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Du rhum, des femmes, des M&M’s, des saucisses Zwan et d'la bière, nom de Dieu

Samedi 9 décembre 2017

L’anecdote commence à dater un peu mais elle est une bonne intro à mon propos. Dans les années quatre-vingt, Van Halen
Van Halen


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exigeait dans sa loge un bol de M&M's. S'il y en avait un seul marron, le show était annulé. Dans son autobiographie, le chanteur du groupe expliquera que cette clause permettait de vérifier si les organisateurs avaient bien lu le contrat dans son intégralité.
Voilà donc un exemple de rider, terme utilisé pour définir un contrat qui stipule les conditions techniques et d’accueil d’un groupe lors d’un concert.
Quand j’ai interrogé le groupe Belphegor
Belphegor


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sur le sujet, j’ai reçu ceci comme réponse: « Hail! No sense talk about riders in music. » Ah bon !? Moi qui pensais que mon sujet d’article était excellent (hum hum :-)).



Boris le guitariste de Monkey3
Monkey3


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m’apporte quelques précisions. « Un rider exprime ce dont le groupe a besoin pour l’assistance technique afin qu’il puisse réaliser un show de qualité, dit-il. C’est aussi des demandes à propos de la nourriture, du logement, des coulisses et d’autres petites choses. Si on prend la partie technique, nous avons un rider complexe puisque nous utilisons des projections vidéos et un jeu de lumière spécial. À propos du reste, nous sommes assez simples. »

Du côté des organisateurs, on est également très attentifs sur le sujet. « Les riders nous permettent de connaître les contraintes logistiques, techniques, humaines pour l’accueil d'un spectacle, confie Hélène du Hellfest. Les frais liés aux riders sont généralement fonction de l'ampleur du show en termes de production. Plus il y a de matériel à installer, plus ces frais sont élevés. Il y a effectivement un débat autour de certains groupes qui exagèrent. Notamment en termes de qualité, de quantité, de marques, etc. »

Pedro Mass Deathtruction précise, lui, qu’aucun groupe ne peut exagérer ses demandes techniques. « Au plus il y a de matériel fourni, au plus le concert sera bon, si l'artiste est bon, dit-il. En général, les riders sont bien ficelés, souvent par des techniciens qualifiés pour la partie technique, par les managers pour les demandes contractuelles et par le groupe lui-même pour la partie catering. »

Marquer les esprits

Maintenant que les présentations sont faites, creusons un peu.
Dernièrement, Rémi programmateur à l’ASBL Cronos cherchait, sur Facebook, des bouchers ou des gens qui travaillent dans des abattoirs pour se procurer du sang pour un concert à l’Entrepôt. « Un rider assez courant dans le black metal », ajoute-t-il. Rémi précise aussi que la plupart des groupes qu'il reçoit ne sont pas musiciens professionnels. Partir en tournée implique donc de prendre des congés et de faire certains sacrifices. « Bien accueillir un groupe, poursuit-il, signifie marquer les esprits. Un agent européen enverra plus facilement ses pointures dans des salles où l'accueil est bon. Les conditions de jeu ainsi que la manière dont on reçoit les groupes sont des choses qu'on met en avant et qui comptent aux yeux des groupes et de leur booking. »



Olivier, manager chez Jamian Productions, veille à ce que les riders de ses groupes soient raccord avec la salle ou le festival où ils vont jouer. Il ne demande pas le même rider au Hellfest qu'à un petit organisateur qui a de petits moyens. Il tient égalent compte de la distance entre le concert et le domicile. Il lui arrive très souvent de demander le minimum et de dire à l'organisateur de faire de son mieux. Parfois, le groupe est surpris avec un alcool local ou un gâteau fait maison.

Non mais c’est exagéré, ça !

Olivier poursuit. « Clairement, des groupes abusent en demandant des quantité d'alcool démentielles. Je comprends les organisateurs qui fulminent en se retrouvant face à ce type de riders, poursuit Olivier. Pareil pour les hôtels demandés qui reviennent parfois plus cher que le cachet de l'artiste lui-même. Certains groupes ne se rendent pas compte du coût de leur demande et les organisateurs ne peuvent pas suivre. » Olivier pense que c’est aux organisateur de hausser le ton et qu’un groupe refusera rarement une date parce que son rider n'est pas respecté « au poil de cul » comme il dit.

Roman Hödl, bookeur européen chez District 19 et notamment pour l’Eindhoven Metal Meeting me dit que souvent les groupes professionnels sont raisonnables parce que le but est d’être encore bookés par le promoteur dans le futur. « Les nouveaux groupes ne se rendent pas toujours compte de ce qu’ils demandent ni du coût de certains services ni de la production d’un spectacle. Ils demandent plus que ce que leur statut commercial est », ajoute Roman.
Pour Roman, les groupes et leur manageur doivent se rendre compte que tout ce qu’ils demandent a un impact direct sur le montant du cachet. Si on propose 2.000€ à un groupe pour un concert et que celui-ci demande un catering d’une valeur de 250€, l’offre initiale sera revue à la baisse. « En obtenant un Whisky de 30 ans d’âge, le groupe pourrait être heureux, mais en fin de compte, il paye pour cette bouteille », conclut-il.

Johan de Celeste
Celeste


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approuve. Il ajoute que ça l'insupporte de voir des groupes profiter de leur aura ou de leur statut pour demander des trucs complètements délirants. Il précise que, le souci, c'est que ce phénomène ne touche pas que les gros groupes. « J'ai déjà vu des gens péter plus haut que leur cul au 1.000e abonné Facebook et commencer à demander des trucs exubérants, poursuit Johan. C'est un principe complètement débile. La thune qui est dépensée à satisfaire ces requêtes puériles finira en moins sur leur cachet à un moment ou un autre. Mais c'est peut-être le prix à payer pour avoir l'impression d'être une star le temps d'un soir. »



Guest ou pas guest ?

Fabian Pigneur de Yata
Yata


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(e.a.), réagit aux remarques de Roman et Yohan. « Il faut voir les conditions demandées mais je dirais que, pour un groupe qui possède un EP ou un album, demander une guest par musicien, cinq boissons et 100 ou 150€ ce n'est pas volé. Il faut aussi voir le type d’évènement. C’est différent si c’est un concert en maison de jeunes devant dix personnes ou en festival devant cinq cents personnes. »

Patrick d’Innerfire
Innerfire


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ajoute qu’avec les copines des musiciens et les copains, on peut vite arriver à une liste de quinze personnes pour un groupe qui comprend cinq musiciens. Plus l’organisateur en offre moins il y a de l’argent dans la caisse. Ça paraît logique. « Revenons les pieds sur terre, ajoute Patrick, on n’est pas à Los Angeles. En Belgique, très peu de groupes vivent de leur musique. Il faut rester un minimum logique pour que les gens puissent continuer à organiser des concerts. Les guests c’est un manque à gagner énorme pour eux.»

On ne demande pas de guest, chez Lethvm
Lethvm


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. « Dans le groupe, explique Vincent, le chanteur, nous avons déjà tous dû organiser des concerts et nous en connaissons les difficultés. Nous préférons que nos potes payent une entrée, supportent l'orga et les groupes. »
Les demandes techniques du groupe sont réduites au minimum afin d’être rapide et efficace. D’autres aspects ne sont pas écrits mais discutés directement avec l’organisateur comme la taille de la scène, les amplis et/ou la batterie repiqués, etc.

Négocions, bon sang !

Nicolas de Mutiny on the Bounty
Mutiny on the Bounty


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me confie que tout est négociable et qu’un repas chaud, un endroit pour dormir et quelques boissons c’est le minimum. Tout en tenant compte du fait que le prix d'une bière ou d’un hôtel n’est pas le même en Norvège ou en Espagne. « Il nous est arrivé de jouer des concerts et de pas savoir où on allait dormir et de devoir demander lors du show si quelqu'un peut nous héberger, poursuit Nicolas. Organiser un concert c'est avant tout offrir un moment humain, partager des choses. Si un repas n'est pas au minimum offert, je ne vois pas trop à quoi ça sert d'organiser un concert. »

Niveau catering, chez Celeste
Celeste


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, ce n’est pas compliqué non plus. Yohan m’explique qu’à une époque, le groupe demandait des quantités importantes de bière, qu’il buvait vraiment. Maintenant, le groupe sollicite un endroit pour dormir et un repas chaud. Par contre, à plusieurs reprises certains riders n’ont pas été respectés. « Je ne pense pas que tous les orgas les lisent, malheureusement, ajoute Yohan. Quand t'as répété dix fois que t'utilisais de la fumée et qu'une fois arrivé, après dix heures de route, on te dit qu'il y a un détecteur et que c'est pas possible, ça fait péter un câble. »



Didier de La Muerte
La Muerte


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confirme qu’il est très rare qu’un rider soit respecté de A à Z. Chez eux, les riders sont définis uniquement en fonction des besoins et de certaines choses incontournables au niveau sécurité ou facilité. « Avec les années d’expériences, tu comprends très vite ce qui est indispensable, confie Dider. Je crois que nous sommes relativement souples par rapport à nos riders. Tout est aussi une question de relation, du type d’organisateur, etc. Par le passé, nous avions placé une boite de saucisses TV Zwan dans notre rider. Lorsque celle-ci était présente dans les loges, inutile de s’inquiéter pour le reste ! Si la boite y est, le reste le sera aussi ! » Visiblement les M&M’s n’ont plus la cote :-)

Donc, riders, oui. Un petit contrat, c’est mieux pour que chacun sache de quoi on parle. Surtout pour l’aspect technique. Pour le reste, le côté obscur de la force, bon, ben, là tout est dans la négociation, l’empathie et le respect.
Pour terminer, je ne résiste pas à l’envie de partager avec vous quelques riders qui m’ont fait sourire au fil des discussions avec les différentes intervenants de cet article.


Rémi Lambert de l’ASBL Cronos: « Nader Sadek
Nader Sadek


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voulait des branches d'arbres morts pour décorer la scène. Nous avons été les chercher le jour même avec un membre du groupe, dans ma voiture personnelle. La traversée d'Arlon, coffre grand ouvert, avec des branches enfournées dans l’habitacle et qui dépassaient de plus d'un mètre, restera un moment inoubliable. »


Olivier, manager chez Jamian Productions : « The Arrs demandait des criquets grillés sur son rider et je me rappelle qu'une salle a bien voulu leur en trouver. Autant dire que tout le monde a goûté les criquets. »

Roman Hödl, European booking agent District 19 / Eindhoven Metal Meeting: « Certains demandent des choses inacceptables. Par exemple : des têtes d’animaux, du vrai sang d'animaux, des femmes nues, des putes, de la drogue, du vin super cher, des feux d’artifice, des cordes de guitare, quatre fois plus de nourriture et de boissons qu'une personne normale peut consommer, une salle de fitness personnelle, etc. La liste est aussi longue qu’il y a d'idiots sur terre. »

Pedro du Mass Deathtruction : « Hatesphere
Hatesphere


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qui demandait une paire de chaussettes par musicien. Hate
Hate


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qui demandait un paquet de cigarettes par artiste. »


Nicolas de Mutiny on the Bounty
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: « Le meilleur est un endroit où on a souvent dormi a Southampton ou la douche était cassée. Un panneau stipulait: This shower's broken. There's one upstairs but if I were you I would wait outside until it rains.»
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AUTEUR : Isabelle
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup...
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière ve...
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière vers un autre secteur et qu’elle est devenue terriblement en manque… d’écriture. A rejoint l’équipe en ju...
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière vers un autre secteur et qu’elle est devenue terriblement en manque… d’écriture. A rejoint l’équipe en juillet 2016....
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière vers un autre secteur et qu’elle est devenue terriblement en manque… d’écriture. A rejoint l’équipe en juillet 2016....

► COMMENTAIRES

NEDURB - 09-12-2017, 15:16
j'ai eu vent de demandes de prostituées de la part de lemmy (il y a 30 ans, lors du passage de motorhead par ici) sinon certains groupes nous ont demandé des marques (scweppes, dark dog, schweppes, champagne, etc pour ne rien consommer et tout embarquer à la fin de la soirée y compris les restes du groupe de la veille... vla l'image que ça donne je sais p
ISABELLE - 13-12-2017, 21:08
C'est une des facettes, effectivement....
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