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Le street art au féminin!

Maëva Martinez aka Kashink!


Mardi 30 novembre 2010

Il y a plus d'un millier d'années dans une tribu nord américaine, naquit un enfant bénis des dieux. Toute la tribu l'attendait. Il allait, après tant d'années de souffrance, sauver son peuple de la situation précaire dans laquelle ils vivaient... Ce qui suit n'est pas son histoire!
Mais bien celle de... Maëva Martinez aka KASHINK!!



Masque à Molitor! Pic by Atome

1. Hello Maëva, peux-tu nous dire qui ou qu'est-ce qui t'as donné l'envie de commencer à peindre et d'où vient ton nom d'artiste "kashink"?

J’ai commencé à peindre début 2000, je dessinais déjà pas mal avant. Dès le début, j’ai commencé à peindre sur toile avec des bombes et des pinceaux, j’utilisais l’aérosol pour faire des fonds, des effets de coulures, de crachotis, etc. et de l’acrylique ou de la gouache pour le reste.
Ca faisait longtemps que j’étais attirée par le graffiti mais ça me paraissait assez difficile techniquement, je me suis finalement lancée à faire mon premier vrai mur en 2006, après avoir commencé à peindre sur les murs au pinceau en 2005.
J’ai juste rencontré les bonnes personnes au bon moment, des graffeurs réputés qui m’ont encouragée à m’y mettre en voyant mes dessins.
KASHINK est un nom que j’utilisais depuis longtemps comme pseudo pour singer mes toiles, en street art je faisais des stickers depuis 2000 et je les posais déjà à Paris avec ce blaze là.
Donc quand je me suis vraiment mise au graff, j’ai évidemment continué à utiliser ce nom là. Ca vient des comics, c’est comme une onomatopée, comme par exemple « KLAK » ou « BOOM », KASHINK est un « bruit » dans le même style.


Finished... Pic by Iodah
"You know what time it is!" 
Grandmaster Flash


2. Depuis tes débuts jusqu'à aujourd'hui, quelles sont ou ont été tes influences et tes sources d'inspiration?

A mes débuts, ma grande inspiration était Frida Kahlo, c’est encore une peintre que j’admire beaucoup aujourd’hui, mais depuis mon style a évolué et je me suis inspirée de beaucoup d’autres peintres, de rue ou pas d’ailleurs, comme Basquiat évidemment mais aussi Murakami, Miro, des peintres pop art comme Roy Lichtenstein ou Keith Haring. Mais je suis aussi très influencée par la BD et l’artisanat mexicain et slave, j’aime beaucoup la manière de découper les contours très nets avec des couleurs vives, les artisans ont un savoir faire unique qui est souvent dévalorisé, malheureusement.
Je faisais du tatouage aussi à l’époque (je vais m’y remettre d’ailleurs !) et ça m’a pas mal influencé aussi, le style rockabilly en particulier, avec des motifs retro, le folklore mexicain du catch, etc.
Comme je me suis mise au graffiti après avoir passé quelques années à peindre avant sans trop d’influence « street », j’ai développé mon propre style en puisant partout et quand j’ai peint sur des murs, ça coulait de source, j’avais déjà mon univers.


Action! Rue des Maraichers

3. J'ai eu l'occasion de faire part de tes travaux aux gens qui m'entourent et nous nous sommes posé cette question: te considères-tu comme une artiste peintre ou une graffiti artiste? Quelles sont tes relations avec le milieu du graffiti?

Grande question ! La différence entre « street art » et « graffiti » ou ce qui est vraiment du graffiti ou pas, c’est un grand débat. On passe des heures à en parler pour finalement ne pas trouver de vraie définition de l’un ou l’autre.
Si je peins sur des murs avec une bombe, je fais obligatoirement du graff ? Ca dépend de qui va se trouver en face de moi, si c’est quelqu’un qui ne connait pas du tout, le seul fait d’utiliser une bombe définit mon geste comme graffiti, alors que quelqu’un qui peint aussi sur les murs va penser que les dessins que je fais, n’est pas du graff parce que je fais peu de lettres, etc. Certains définissent aussi le graffiti par la manière dont tu le fais, si tu fais du vandale, que tu peins des trains, moi j’ai fait peu de vandale donc on pourrait me dire que ce que je peins n’est pas purement graffiti.
A priori on pourrait « classer » mon style dans le street art, c’est une définition un peu vaste et qui ne veut pas dire grand-chose, mais bon, ça me dérange pas et à vrai dire je m’en fous un peu. Quand je parle de ce que je fais, je parle de street art ou graffiti, peu importe, mais je tiens à me considérer aussi comme peintre, puisque c’est comme ça que j’ai commencé et que je continue à peindre des toiles et à faire des expos. Et c’est aussi mon métier, je suis peintre en décors, donc je peins tous les jours, dans d’autres contextes (déco d’intérieur, décors de films ou d’opéra, etc.) donc si on devait résumer, je suis à la fois graffiti artiste, artiste peintre et peintre en décors, bref peintre quoi.

En ce qui concerne mes relations avec le milieu du graffiti, mon cas est particulier puisque j’ai eu un parcours très différent des autres. Je peignais avant sur toile, j’ai peint ensuite sur murs, et je continue les deux. En général c’est plutôt l’inverse qui se passe pour les autres, qui ont tous commencé à l’adolescence contrairement à moi. Je suis plutôt contente d’avoir commencé plus tard en fait, ça m’a évité d’avoir à faire mes preuves, quand tu es jeune tu as envie que les autres t’acceptent dans leur truc, moi j’avais déjà 25 ans, j’avais développé ma personnalité et mon tempérament, donc j’étais pas dans une attente de reconnaissance par rapport aux autres. Si j’avais commencé adolescente, je ne pense pas que j’aurais le style que j’ai aujourd’hui, c’est sûr !
C’est vraiment une bonne chose aussi par rapport au milieu du graff, je n’ai eu aucun problème avec les mecs qui étaient déjà dedans depuis longtemps, puisque je n’ ai jamais essayé de me comparer à eux ou de rivaliser avec eux. Ceux qui m’ont encouragé au début étaient déjà des pointures qui peignaient depuis plus de 20 ans ! J’ai toujours assumé de m’y être mise plus tard, les gens sont venus vers moi assez rapidement en fait pour me proposer de peindre avec eux. Du coup j’ai fait des rencontres super intéressantes, des gens avec qui je peins encore aujourd’hui, 5 ans après.


Expo "Mascalaveras" chez All Over

4. Beaucoup de filles se demandent comment tu as réussi à te faire une place dans ce monde d'hommes et si cela a été périlleux? Pourrais-tu les éclairer?

Ca aussi c’est une grande question, j’ai été invitée récemment à peindre à La Villette à Paris, dans le cadre d’un festival de hip hop féminin, et il y avait un débat organisé à ce sujet. On me pose souvent la question, en tout cas encore une fois je pense que le fait d’avoir commencé tard a aussi aidé. Quand tu es jeune, surtout pour une fille dans un milieu de mecs, tu cherches à montrer à tout prix que tu es capable d’en faire autant que les mecs, ça peut être un challenge de s’intégrer.
Personnellement j’avais déjà eu une expérience similaire qui m’avait beaucoup appris, j’ai intégré le milieu du Hardcore quand je suis venue habiter à Paris, j’avais 17 ans. J’ai même été Straight Edge pendant 3 ans ! J’ai passé des années dans cette scène, à aller donner des coups de pieds retournés dans les concerts (je m’en suis aussi pris pas mal dans la gueule haha !) et à gueuler dans des micros, c’était la belle époque ! Avec mes potes on faisait des heures de route pour aller voir un concert à Bruxelles, voir un festival à Courtrai, à Rennes, à Londres, on dormait à 5 dans la bagnole, on repartait le lendemain la tête dans le cul, c’était tout pour le Hardcore. J’ai adoré cette période de ma vie, à l’époque où les filles sont censées aller danser en club et se bourrer la gueule, moi j’étais végétarienne, je buvais pas, je fumais pas, et j’allais me taper la gueule en concert !
Je pense que le milieu du graff est similaire, une majorité de mecs, un milieu underground ou tout le monde se connait, des codes particuliers, un jargon, etc.
C’est sûr que c’est un milieu masculin, qui peut être considéré comme macho parfois, mais ça ne t’atteint que si tu attends quelque chose des autres. Si tu fais ton truc, que tu t’y tiens, et que tu ne cherches à rien prouver à personne, il n’y a aucune raison pour que quelqu’un vienne t’emmerder. Au contraire, les gens curieux et ouverts viendront vers toi.


Kashink - Ema Parc de La Villette, Paris

5. Dans tes peintures, tu représentes souvent des personnages avec plusieurs yeux, pourrais-tu nous expliquer ce que cela à comme signification pour toi?

On me pose tout le temps cette question, évidemment. En fait c’est venu d’une situation très précise, c’était en 2007. J’avais fait une fresque avec mon pote REKM aux Frigos (dans le 13ème à Paris), on allait souvent peindre là bas tous les deux, et on faisait des très grandes pièces.
Un jour je retourne au mur, et sur place je me rends compte que tout avait été repeint en blanc ! Sauf mes trois personnages, dont les yeux, les oreilles et la bouche seulement avaient aussi été repeints en blanc. Ma signature avait été effacée. J’ai halluciné, je ne comprenais pas ce qui s’était passé, vu que d’habitude quand tu te fais recouvrir c’est en entier ! Je connaissais un mec qui avait son atelier en face du mur où on avait peint, et il m’a expliqué que c’était une allemande qui était venue faire une expo sur la situation politique en Birmanie (qui est bien merdique et dont personne ne parle), elle avait donc repeint tout le mur en blanc et avait utilisé mes personnages pour illustrer un texte qu’elle avait écrit à côté, qui expliquait les problèmes en Birmanie, etc.
Je savais pas comment réagir, vu que la cause défendue était juste, mais que la nana avait quand même utilisé ma peinture sans me demander et en effaçant ma signature !
Du coup j’ai repeint des yeux des oreilles et des bouches à mes personnages, et vu que j’étais un peu énervée j’ai repris mes personnages en y ajoutant des yeux supplémentaires, un bâillon sur la bouche, j’ai ajouté des moustaches à un personnage féminin aussi.
C’est à ce moment là que mes personnages à 4 yeux sont nés.
Aujourd’hui je le fais quasiment systématiquement, c’est aussi une manière de représenter ce qu’on montre et ce qu’on pense vraiment. Si tu regardes bien, la première rangée d’yeux exprime toujours quelque chose de très différent de la deuxième.


Ladder style Porte de Vincennes

6. Tu as aussi une ligne de vêtement "kashinkclothing" comment définirais-tu ton concept et quels sont les secrets de ta conception?

J’ai commencé à customiser des vêtements à peu près au même moment que j’ai commencé à peindre sur des toiles, vers 2000. J’ai eu des commandes, j’ai eu des points de vente dans des magasins à Paris, et puis petit à petit j’ai vu que j’y passais énormément de temps pour finalement un retour financier moyen. Donc j’ai un peu mis ça de côté mais là j’ai eu des commandes récemment, donc je m’y remets ! Je pense que le fait que les gens commencent à connaître mon nom aide aussi. Je continue à faire des trucs dans le style ce qui m’a influencé en premier : le tatouage, l’esprit rockabilly, etc.
J’ai aussi lancé une petite série d’objets de déco customisés, tu trouveras des photos ici :
http://www.flickr.com/photos/kashinkustom/
Et les secrets de conception restent secrets, haha !!



7. Lorsque nous avons fait connaissance, tu chantais dans un groupe de métal hardcore, Divine, je sais que le groupe a splité mais toi, as-tu eu l'occasion de faire d'autres expériences musicales?

J’ai chanté dans deux groupes de Hardcore, d’abord un groupe plutôt Old School qui s’appelait Stone Edge, c’était vers 1999-2001, puis en 2005 je crois j’ai commencé à chanter dans Divine. C’était deux super expériences, j’y ai pris beaucoup de plaisir.
Depuis qu’on a arrêté avec Divine ça me manque de ne plus chanter dans un groupe ! J’ai eu des projets électro à côté, j’ai aussi fait des instrus et j’avais quelques morceaux qui sont toujours à enregistrer pour des prods plutôt électro-hiphop, ça a pris du retard mais je devrais aller enregistrer d’ici la fin de l’année.
J’ai toujours plein d’idées de compos, je suis musicienne depuis longtemps donc ça me manque de ne plus faire de musique vraiment régulièrement, j’adorerais trouver un groupe avec qui faire du vieux rock’n’roll ambiance Johnny Cash
Johnny Cash
Clique pour voir la fiche du groupe
ou Charlie Feathers.
J’ai aussi fait un peu de DJ au bar que j’ai décoré La Lucha Libre, à Paris, où il y a un ring au sous sol pour faire des matchs de catch, on mixe sur le ring aussi c’est assez marrant. Faut venir !



Merci à Kashink pour le temps qu’elle nous a offert, et oui nous arrivons déjà à la fin.
Pour ceux qui n’en n’ont pas eux assez voici de quoi les sustenter :

http://www.flickr.com/photos/kashink/
http://www.myspace.com/kashink
http://www.myspace.com/kashinkclothing












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