Chronique

SUUNS
The Witness

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Joyful Noise Recordings

8 pistes - 37'57
Sorti le 03-09-2021


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Vendredi 3 septembre 2021

The Witness est un album étrange. Étrange parce que la première écoute passe un peu comme un songe, dont on ne retient que la voix fragile de Ben Shemie émergeant d’une brume d’effets, quelques lignes de guitare fluette et des nappes de claviers en suspension sur des rythmiques résolument plus jazz que rock. Étrange encore parce que, même si on reconnait instantanément la patte de SUUNS
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, ce nouvel opus ne renvoie à rien de ce que la formation montréalaise a fait jusqu’à présent. Étrange enfin parce que si l’on se tourne vers l’artwork (c’est très arty diront certain.e.s, ça ressemble à la pochette d’un vieux bootleg diront d’autres), on abandonne très vite tout espoir d’y découvrir l’ombre d’une clé de compréhension à ce qu’on vient d’entendre.

Pour mieux appréhender ce cinquième long-format de SUUNS
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, sans doute faut-il revenir à Fiction, le EP paru en octobre 2020, dont l’écoute s’était vite révélée difficile, si pas éprouvante, même pour les fans les plus assidus. Rétrospectivement, il s’avère que ces six titres entrebâillaient de nombreuses portes que le groupe a entrepris d’ouvrir tout à fait sur The Witness. Et c’est véritablement dans ce Fiction d’une vingtaine de minutes, à la fois laboratoire de sons et cabinet de curiosités, que The Witness prend sa source.

Si l’on retrouve ces infra-basses ténébreuses et ces timbres Electro-Kraut chers aux Montréalais, le côté binaire et droit-au-but des deux premiers albums a en revanche tout à fait disparu, l’aspect expérimental jusqu’au-boutiste des deux albums suivants s’est quant à lui mué en une quête (manifestement obsessionnelle) d’épure. Le désormais trio esquisse des mélodies dépouillées jusqu’à l’os (C-Thru), à la beauté proche de l’indicible (Witness Protection) et décline des progressions d’accords en tempo lent (Go to my Head) sur des structures exemptes de toutes ces astuces dont les musicien.ne.s usent (et abusent parfois) pour toucher immédiatement la corde sensible. Et comme s'ils voulaient définitivement faire de ce nouvel effort une expérience auditive unique, les Québécois élèvent encore leurs synthés en arabesques Prog/Space-Rock à la limite de l’anachronisme (The Trilogy) et glissent, ici une flûte aérienne (Third Stream), là un saxophone un brin mystérieux (Clarity).

Cela pourrait s’apparenter à un exercice de déstabilisation concertée des auditeur.rice.s et se perdre rapidement dans les méandres de la démonstration hyper-esthétisée. Sauf que SUUNS
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ne fait pas compliqué juste pour le plaisir de ne pas faire simple. La complexité assumée, le souci (qu’on imagine maniaque) du détail et l’absence de tout compromis artistique scellent l’identité de ce nouveau long-format et font aussi le charme trouble, agréablement dérangeant, des huit titres qui le composent.

À contre-courant d’une époque où l’on découpe allégrement les albums en playlists quitte à les vider de leur substance, The Witness tient assez de l’acte de résistance. Résistance à ce tout tout-de-suite symptomatique de notre temps. Résistance au diktat de la « culture » digitale qui voudrait bien faire de l’art un bien de consommation à l’obsolescence programmée comme un autre.

Hymne à la lenteur, à la langueur, The Witness est un album à la flamboyance discrète, qui se dévoile par touches, au gré des écoutes répétées, attentives qu’on lui accorde, un album conçu pour accompagner ses auditeur.rice.s sur le temps long. Un album rare.
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AUTEUR : Olivier
Infatigable découvreur de sons, Olivier parcourt la planète musique depuis quelques décennies maintenant, avec un intérêt plus marqué pour le me...
Infatigable découvreur de sons, Olivier parcourt la planète musique depuis quelques décennies maintenant, avec un intérêt plus marqué pour le metal, le post-rock et le jazz. Il fréquente assidûment les salles de concerts de France et de Belgique, mais il n'hésite pas à passer les frontières et à tailler la route pour assister aux presta...
Infatigable découvreur de sons, Olivier parcourt la planète musique depuis quelques décennies maintenant, avec un intérêt plus marqué pour le metal, le post-rock et le jazz. Il fréquente assidûment les salles de concerts de France et de Belgique, mais il n'hésite pas à passer les frontières et à tailler la route pour assister aux prestations de ses artistes favoris. Il a rejoint l'équipe en novembre 2020....
Infatigable découvreur de sons, Olivier parcourt la planète musique depuis quelques décennies maintenant, avec un intérêt plus marqué pour le metal, le post-rock et le jazz. Il fréquente assidûment les salles de concerts de France et de Belgique, mais il n'hésite pas à passer les frontières et à tailler la route pour assister aux prestations de ses artistes favoris. Il a rejoint l'équipe en novembre 2020....
Infatigable découvreur de sons, Olivier parcourt la planète musique depuis quelques décennies maintenant, avec un intérêt plus marqué pour le metal, le post-rock et le jazz. Il fréquente assidûment les salles de concerts de France et de Belgique, mais il n'hésite pas à passer les frontières et à tailler la route pour assister aux prestations de ses artistes favoris. Il a rejoint l'équipe en novembre 2020....

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