Lundi 17 mai 2010

E : Brian a quitté il y a un an maintenant… j’ai entendu qu’il s’était blessé ?

B : Oui, c’est ça.

E : Mais il y a alors une chance qu’il revienne dans le groupe un jour ?

B : Eh bien… je ne suis même pas sûr qu’il soit lui-même intéressé ! C’est vraiment dommage que ça se soit passé de cette façon, sa blessure l’empêche de jouer de la guitare alors qu’il aime ça par dessus tout, mais le fait est que suite à ça il est reparti en Virginie, et il a commencé une nouvelle vie. Alors même s’il pouvait recommencer à jouer, je ne sais pas s’il aurait envie de revenir dans le groupe.

E : Peut-être avec moins de tournées…

B : Oui, peut-être avec moins de tournées mais ça voudrait dire y consacrer moins de temps… Tu sais, pendant longtemps on a espéré qu’il se rétablisse et qu’il revienne jouer dans le groupe.

E : Mais il a une nouvelle vie maintenant…

B : Oui, voilà.




E : Mais ce genre de vie, que beaucoup considèrent comme une vie « normale », est-il possible à combiner avec votre vie de tournées intenses, vous qui repartez aux Etats-Unis la semaine prochaine pour enchaîner aussitôt avec le Japon et l’Australie ?

B : C’est difficile, tu sais… c’est difficile. On n’a rien, aucune sécurité, aucune stabilité, tout change tout le temps. Tu sais, même si on essaie de faire un peu d’argent en tournée, quand on prend un peu de temps libre ou qu’on essaie d’avoir une vie un peu plus normale l’argent ne rentre plus… On ne reçoit pas notre paie chaque semaine, on ne sait jamais de quoi le lendemain est fait. On ne peut pas rester là, s’installer dans une maison, avec des gosses, des chiens…

E : La vie normale quoi !

B : Oui c’est ce qu’on appelle la vie normale mais je ne sais pas si c’est la meilleure vie, la meilleure façon d’appeler ça, ce serait plutôt la vie banale. Je pense que c’est possible de combiner vie banale et quelques tournées par-ci par-là mais on n’est pas ce genre de groupe à sortir un single puis faire 2 mois de tournée puis revenir à la maison. On n’est pas un groupe de pop énorme, on a la vie plutôt dure.

E : Mais quand vous revenez aux Etats-Unis, je suis sûr que vous retrouvez votre entourage, votre cercle d’amis, ce n’est pas trop difficile à vivre de quitter de nouveau tout ça pour revenir en Europe ? Il n’y a rien là-bas qui te ferait dire « je devrais encore rester un ou deux mois de plus » ?

B : Tu sais, c’est difficile de bâtir des relations à long terme en étant si souvent absent. Par exemple, le mois dernier deux membres de ma famille ont eu leur anniversaire, je n’étais pas là, j’ai dû leur envoyer leur cadeau par poste. Eux, ils étaient là pour le mien. Et même quand on rentre à la maison, on parle à nos amis et ils nous semblent tellement différents… c’est difficile de vraiment se comprendre.

E : Parce qu’ils ont des gosses et des chiens !

B : Ouais, exactement ! Et ils ne vivent que le week-end. Ils vivent deux jours par semaine. Ils s’arrangent pour tout caser dans ces deux jours et j’ai beaucoup de mal à comprendre ça. Nous, on n’a pas de week-end. On joue tous les soirs…

E : … Et vous vivez tous les jours !

B : Oui, on n’a pas de vacances ou de week-end, notre vie est comme ça tous les jours. Et c’est ce qu’il y a de mieux.

E : C’est pour ça que tu fais de la musique ?

B : Je pense, oui.

E : Mais la musique est aussi une façon de propager vos idées et on sait tous que la situation politique américaine actuelle est très controversée (ndlr : pour rappel, l’interview a été réalisée en 2008, le président américain était donc George W. Bush), n’avez-vous jamais voulu utiliser votre musique pour essayer de mettre en avant vos idées politiques, comme beaucoup de groupes le font ?

B : Non, The Dillinger Escape Plan
The Dillinger Escape Plan


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c’est plutôt de la masturbation pour nous. J’aimerais pouvoir dire de grandes choses, essayer de faire changer les gens mais pour nous, écrire des chansons c’est plutôt sortir ce qui doit l’être. Un peu comme quand tu as une érection pendant toute la journée, une fois que tu as fini tu te sens bien, satisfait, tu repars en tournée, tu joues tes chansons, et à un moment tu commences à avoir de nouveau une érection et tu dois sortir un nouveau disque.

E : C’est un besoin ?

B : Oui c’est un besoin. Il le faut. The Dillinger Escape Plan
The Dillinger Escape Plan


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c’est très égoïste, c’est un putain de grand projet de masturbation.

E : De la masturbation de groupe !

B : Oui pour chacun d’entre nous. Et quelque part, chaque show est la représentation de tout ça. C’est en gros ce que ça représente pour nous. J’admire les groupes qui utilisent ce qu’ils font pour diffuser un message mais ce n’est pas notre cas et de toute façon nous avons tous des idées et points de vue assez différents, mais nous avons en commun notre amour de la musique et notre passion pour ce que nous faisons.



E : A propos de votre musique justement, tu penses que le fait qu’elle devienne un peu moins violente pourrait impliquer que votre attitude sur scène devienne moins extrême ? Je pense notamment au Reading Festival 2004 où Greg a fait ce truc avec son t-shirt (ndlr : la légende raconte que pour réveiller le public, Greg a déféqué dans un sachet avant de l'envoyer dans le public qui lui a renvoyé le sachet, que Greg a ensuite ouvert pour se l'étaler sur son T-shirt à la fin du show), est-ce que vous pourriez faire ça sur vos nouveaux morceux ?

B : (rit puis réfléchit) … Je ne sais pas ! En fait, quand on a commencé à travailler sur cet album on était un peu dans la galère, on essayait de s’en sortir financièrement, de survivre. On était assez frustrés ! Ces frustrations ont créé un album composé de 100% d’émotions. Même sur des morceaux moins agressifs ! Par moins agressifs j’entends qu’on n’y ressent pas de la colère mais des émotions et frustrations…

E : Les gens confondent toujours agressivité et violence pure…

B : La musique technique ne donne rien d’agressif ou d’émotionnel. La plupart de cette musique est surtout dénuée de toute émotion et n’est que mécanique. Si tu joues de la musique technique et que tu veux y ajouter de l’émotion tu dois créer de la tension mais on n’est pas ce genre de groupe à réfléchir intelligemment sur l’effet de notre musique, genre « si on met cette partie-là comme ça ça va être cool parce que ça va donner ça etc. ».

E : Vous ne laissez pas de place à la théorie dans ce que vous faites alors ?

B : Non… Tu sais, on ne se considère pas comme un groupe violent. Quand on joue on ne se soucie pas de ce qui se passe autour de nous. Ce n’est pas comme si on essayait d’être agressifs envers le public. Les gens viennent vers nous, pas l’inverse.

E : Mais je me souviens il y a trois ans, la dernière fois que vous avez joué en Belgique (ndlr : à Hasselt en mars 2005), j’étais tout près de la scène et tu m’as subitement sauté dessus, guitare en avant. Ce genre de trucs peut effrayer les gens, tu sais !

B : (rit)… oui bien sûr les gens peuvent voir ça comme ça mais maintenant je pense que les gens qui viennent nous voir nous connaissent et maintenant certaines personnes sont déçues quand nous ne nous comportons pas comme ça ! Ils ont vu nos vidéos sur Youtube, et ils se disent « j’ai vu que ce type-là a marché sur des gens, l’autre a sauté guitare en avant, et ce soir ils n’ont rien fait de tout ça ». Le truc c’est qu’on fait ce qu’on a envie, c’est tout. On pourrait vraiment être plus violents. On pourrait leur lancer des objets tranchants à la tête. On peut aussi décapiter des porcs sur scène comme certains groupes black-metal.

E : Pas ce soir s’il te plaît !

B : Non mais peut-être sur la dernière date de cette tournée !

E : Ce serait surtout la TOUTE dernière tournée de Dillinger Escape Plan
Dillinger Escape Plan


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!


B : (rit)… oui peut-être ! Mais ce n’est vraiment pas le but évidemment, de blesser des gens. Dans 99,99% des cas les gens rentrent de nos concerts à la maison sains et saufs. Mais c’est vraiment important pour nous d’avoir quartier libre sur scène, notre jeu de scène et notre musique ne font qu’un et on ne calcule rien, tout se fait comme ça.

A ce moment, un type bizarre déguisé en épouvantail entre dans la pièce et nous salue.

E : Euh… qui est-ce ?

B : Ah, il est dans Stolen Babies
Stolen Babies
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(ndlr : qui jouait juste avant TDEP ce soir-là). C’est un vampire. Il a été mordu une nuit…

E : Par quoi ?

B : Par une espèce de créature de la nuit.

E : Oh, ça craint.

B : Oui, et depuis ce jour-là il est devenu très pale.

E : Oh, il a l’air d’aller bien comme ça.

B : Oui mais son pénis a rétréci aussi.

E : Ah mais ça c’est normal, c’est dû à l’âge.

B : Oui c’est vrai et les vagins deviennent plus gros aussi (rires).

E : (rires) Ok, et ça fait quoi de tourner avec ces gars ? C’est aussi la seconde fois que vous tournez en Europe avec Poison The Well
Poison The Well


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, comment ça se fait ?


B : Eh bien on ne s’était même pas revus entre les deux tournées, et quand on a lancé la nôtre on s’est rendus compte qu’ils comptaient partir plus ou moins aux mêmes dates donc on s’est arrangés comme ça !

E : Ok Ben, une toute dernière question… à quoi peut-on s’attendre pour l’avenir de The Dillinger Escape Plan
The Dillinger Escape Plan


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?


B : J’aimerais le savoir. Tu sais, on vit au jour le jour, on ne calcule pas.

E : Ok, on verra alors ! Merci Ben pour cette interview.

B : Merci à toi mec, à plus !
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AUTEUR : Erik
Rescapé de la scène hardcore underground de la fin des années 90, Erik a lancé Shoot Me Again en 2004 avec Julien, un autre gamin hyperactif de l'...
Rescapé de la scène hardcore underground de la fin des années 90, Erik a lancé Shoot Me Again en 2004 avec Julien, un autre gamin hyperactif de l'époque. Ecumant à eux deux les salles les plus improbables lors du lancement de ce webzine, ils se sont rapidement entourés d'autres camarades de jeu pour renforcer l'équipe. Aujourd'hui concentrÃ...
Rescapé de la scène hardcore underground de la fin des années 90, Erik a lancé Shoot Me Again en 2004 avec Julien, un autre gamin hyperactif de l'époque. Ecumant à eux deux les salles les plus improbables lors du lancement de ce webzine, ils se sont rapidement entourés d'autres camarades de jeu pour renforcer l'équipe. Aujourd'hui concentré sur le développement du site, il est moins présent sur le front. ...
Rescapé de la scène hardcore underground de la fin des années 90, Erik a lancé Shoot Me Again en 2004 avec Julien, un autre gamin hyperactif de l'époque. Ecumant à eux deux les salles les plus improbables lors du lancement de ce webzine, ils se sont rapidement entourés d'autres camarades de jeu pour renforcer l'équipe. Aujourd'hui concentré sur le développement du site, il est moins présent sur le front. ...
Rescapé de la scène hardcore underground de la fin des années 90, Erik a lancé Shoot Me Again en 2004 avec Julien, un autre gamin hyperactif de l'époque. Ecumant à eux deux les salles les plus improbables lors du lancement de ce webzine, ils se sont rapidement entourés d'autres camarades de jeu pour renforcer l'équipe. Aujourd'hui concentré sur le développement du site, il est moins présent sur le front. ...

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