Interview

LA MUERTE

La bête étrange ne meurt jamais


Samedi 21 janvier 2023

Les bruxellois de La Muerte
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déversent leur rock alternatif étrange et obscur depuis le début des années 1980 ; le récit est horrifique, la musique est précurseur. Sous l’impulsion de l’inquiétant Marc du Marais et de l’iconique Dee-J, le groupe n’a cessé d’inventer et de provoquer ceux qui osent s’y frotter. Après un hiatus d’une vingtaine d’années, la perturbante formation a repris vie pour venir à nouveau hanter nos nuits. Avec un nouvel album Sortilegia paru le 25 novembre 2022 et sa présentation exclusive le 25 janvier 2023 au Botanique, il était hors de question de rater l’occasion d’aller tailler une bavette avec eux.



Réactiver la bête terrée dans l’ombre depuis 1994 pour lui redonner vie en 2014 en a surpris plus d’un. Pourriez-vous nous détailler les circonstances qui ont conduit à ce retour inattendu ?

Dee-J : Marc avait depuis quelques mois terminé son film Double Plus Ungood, dans lequel jouait Delfine Bafort. Il s’agit d’une actrice qui a quand même sa cote et qui était venue jouer dans son film de façon amicale. Il se trouve que quelques mois plus tard, elle ouvrait un club à Gand qui s’appelle Gouvernement. Elle a demandé à Marc si La Muerte
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seraient d’accord de venir jouer quelques morceaux pour l’ouverture du club.

Marc a d’office répondu oui, il s’agissait d’une dette d’honneur. Il m’en a parlé après et savait très bien que je ne serais pas chaud du tout mais il m’a demandé de lui laisser quelques mois pour me revenir avec un prochain précis. Si ça ne me plaisait pas, il demandait mon accord pour pouvoir réaliser ce concert malgré tout. Les semaines ont passé et il est revenu avec un projet de line-up que je trouvais très intéressant, du coup ça a éveillé ma curiosité. La suite on la connait.

Marc du Marais : Defline Bafort nous a forcé forcé la main.

Quel a été l’élément déclencheur qui vous a donné envie de donner une seconde vie à La Muerte
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?


Dee-J : Personnellement, c’est le plaisir de jouer. J’ai repris goût au jeu en raison de la composition du line-up et du résultat que ça a donné –le niveau presté. Ensuite, tous les éléments se sont alignés : le concert à l’Ancienne Belgique qui a été un franc succès, Moto qui arrive pour sortir l’album live…tout s’est mis en route de façon naturelle et “facile” –même si rien n’est facile avec nous.

Marc du Marais : La rencontre avec Kirby, ChrisZ de Length of Time
Length of Time


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et Tino de Channel Zero
Channel Zero


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sont l’élément déclencheur qui a permis de donner une seconde vie au groupe.

Avec l’arrivée de trois nouveaux membres, l’équilibre a changé. Comment se passe la collaboration entre les anciens et nouveaux membres ?

Dee-J : Ils se sont très vite impliqués. Quand je suis arrivé à la première répet’, l’idée était de jouer quatre morceaux dans le club. J’avais légèrement survolé ces quatre morceaux à la maison, ça faisait des années que je ne les avais plus joués. Je suis arrivé et j’ai vu une liste de 9-11 morceaux je crois, celui-là on doit le jouer car il est trop bien, celui-là car c’est une classique… Ils étaient très enthousiastes.

Par après, c’est devenu un groupe à part entière où tout le monde a son mot à dire. Ce n’est pas comme si on avait pris trois mercenaires pour jouer avec nous, ce n’était pas l’idée. Je pense que Kirby est identique à moi dans sa philosophie, sa manière de travailler, ses idées et dans son éthique, ce qui a rendu la collaboration facile. Très rapidement, tout le monde a participé à la construction du groupe.

Marc du Marais : La collaboration est un délice suprême, ces gars sont vraiment balaises !

Est-ce que chacun des cinq membres est impliqué à parts égales dans le processus créatif ?

Dee-J : J’y ai déjà un peu répondu à la question précédente. Tout le monde est impliqué, à des degrés différents parce que dans un groupe comme le notre, on démarre souvent d’un riff de guitare dans les compositions mais après, il y a une participation de tout le monde pour créer le morceau en lui-même. On part dans un chaos pour arriver finalement à un morceau finalisé. Tout le monde a sa culpabilité dans le processus.

Marc du Marais : Tout le monde participe au processus créatif, mais Dee-J un peu plus que les autres.



Si vous deviez identifier un ou plusieurs traits qui unifient l’ancien et le nouveau La Muerte
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, quel serait-il ou quels sont-ils ?


Dee-J : Je pense que l’éthique est toujours la même. Le souhait d’être toujours edgy, on n’a jamais lorsqu’on a reformé le groupe eu un sentiment ou un souhait de nostalgie. On va de l’avant et on est je pense toujours créatif, incisif, dérangeant. On est toujours pareil, on doit se battre avec les mêmes démons qu’à l’époque pour se faire respecter. J’ai l’impression qu’à ce niveau là, rien n'a changé bien qu’on ait plus de respect et de reconnaissance maintenant. Cependant, on est resté les mêmes qu’avant. Nous sommes peut-être un peu moins violent sur scène, mais c’est logique. Sinon, nous sommes toujours inclassables, indéfinissables et ça me plaît très bien comme ça.

Marc du Marais : L'esprit punk, primitif, brutal et chaotique.

Lors de votre reformation, les pessimistes ont pointé du doigt la veine metal des derniers venus au détriment de votre héritage rock alternatif. L’album de 2018 a calmé ces craintes, mais Sortilegia inverse la tendance en étant l’opus le plus sombre et typé metal de votre discographie. Pourquoi avoir amorcé ce changement ?

Dee-J : Rien n’est calculé dans ce qu’on fait, on compose en chaos total. Il se trouve que c’est parti dans cette direction, mais c’est juste sonique pour ma part. J’ai l’impression que ça ne change rien à l’identité du groupe, ça ne change rien au fait qu’on ne sera jamais metal, on ne fera jamais partie d’une caste. On reste des outsiders quoi qu’on fasse.

Je considère qu’on a ce privilège de faire ce que l’on veut parce qu’on est pas enfermé dans une case et on en profite. Nous ne sommes pas obligés de faire ce qu’on attend de nous. Quoi qu’on fasse, nous resterons La Muerte
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et on sera toujours considéré de la même manière.

Personnellement, je ne sais pas ; rock alternatif j’en sais rien. Moi j’ai toujours fait les choses come je le sens. Je ne calcule pas par rapport à un style ou autre. C’est un groupe très égoïste en fait La Muerte
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en quelques sortes, pour ma part. J’ai la sensation de faire ce que j’ai envie, si ça plaît à d’autres tant mieux, si ça ne plaît pas tant pis. Je pense qu’il y a encore d’autres groupes qui font ce qu’ils ont envie et qui emmène leur public vers des horizons différents. Si on prend le parcourt de Laibach
Laibach


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durant toutes ces années, ils n’ont pas fait que de l’industriel. Chaque album est un peu un revirement ou une autre direction. Je trouve ça logique personnellement.

Marc du Marais : Nous regardons toujours tout droit sans regarder derrière nous. Nous n'avons pas peur de faire table rase du passé et recommencer avec une feuille blanche, sans exploiter les formules antérieures. C'est dans notre état d'esprit.

Le titre de votre nouvel album est inspiré du recueil de contes Sortilèges de Michel de Ghelderode. Comment cet ouvrage a-t-il influencé l’histoire que vous avez décidé de nous raconter avec Sortilegia ?

Marc du Marais : Nous fonctionnons comme un club de lecture, avant chaque répétition nous parlons des 5 derniers livres que nous avons lus et un jour Tino est venu avec Sortilège de Michel de Ghelderode. Je trouvé que l’ouvrage était pertinent et serait une bonne base de travail pour développer un album avec 11 berceuses macabres... mais l'influence reste vague, c'est juste un point de départ au mystère de la création.

Vous accueillez Ross (Length of Time
Length of Time


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) sur Kiss my Fist et Dominique Van Cappelen (Fleur de Feu
Fleur de Feu


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, Von Stroheim
Von Stroheim


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, etc.) sur Monster. D’où est venue votre envie d’intégrer ces deux victimes consentantes sur chaque titre respectif ?


Dee-J : Ross c’est déjà une voix, et puis il était de passage au studio je pense –je n’ai pas géré le chant, j'ai laissé Marc s’en occuper. Il est arrivé avec la composition en partenariat avec Ross et je trouvais ça très bien.

Dominique, c’est moi qui l’est proposé après que Déhà
Déhà


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m’ait fait écouter certaines choses qu’elle faisait. Je trouve que sa voix est intéressante ainsi que sa personnalité. Je trouvais marrant d’avoir une voix féminine aux côtés de Marc. C’est aussi simple que ça.

Marc du Marais : J’ai toujours trouvé Ross Demon incroyablement talentueux et je rêvais d'une collaboration avec lui ; l'occasion nous était donnée avec le morceau Kiss my Fist. C'était vraiment un bonheur de travailler avec lui en studio.



On peut être surpris du changement récent de label, Consouling Sounds prenant la place de Mottow Soundz . Pourquoi avoir effectué ce transfert ?

Dee-J : Le changement de label relève de mon initiative à la base. J’en ai parlé à Mathias de Mottow Soundz , je lui ai expliqué qu’on faisait un nouvel album que j’allais lui proposer mais également regarder ailleurs ce qu’on nous proposait parce que dans ma tête, j’avais l’impression qu’on avait fait le tour du cycle et qu’on était en train de faire toujours la même chose, avec la même distribution, avec les mêmes réseaux. J’avais envie de voir si on pouvait intéresser d’autres personnes.

J’avais une short List de cinq labels. Je voulais éviter les gros morceaux car je ne voulais pas rentrer dans ce cirque d’être coincé avec plusieurs albums à produire, ça ne m’intéresse pas. Je me suis dirigé vers cinq noms et Consouling Sounds a répondu dans les 24 heures. C’est un label crédible, qui a un beau catalogue éclectique, qui a également un beau réseau à l’étranger. Je me disais que c’était intéressant d’essayer autre chose, de découvrir un autre horizon avec eux.

Pour ce qui est de Mottow Soundz , nous n’avons aucune animosité, ni l’un ni l’autre parce que tout c’est déroulé dans la plus grande transparence et je n’ai que du respect pour ce label qui nous a quand même approché juste après le concert à l’Ancienne Belgique lors de notre reformation et qui après a toujours été partant pour toutes nos sorties. On s’est rendu service mutuellement ; le label a sorti des disques et nous lui avons ouvert des portes. J’ai l’impression qu’on lui a ouvert toutes les portes qu’on pouvait leur ouvrir, rendant le label plus dynamique et ouvert à d’autres sorties ou distributions. J’ai l’impression qu’on était arrivé au bout, qu’on allait rien pouvoir lui offrir de plus et que lui n’allait pas pouvoir nous offrir plus. C’est pour ça que je me suis dits que se serait intéressant d’aller voir ailleurs et quand j’ai vu la couleur de l’album, je me suis dits que c’était encore une meilleure idée d’aller voir d’autres labels. Mais je n’ai que du respect pour Mathias et le boulot qu’il fait car ce n’est pas évident de tenir un label seul.

Marc du Marais : Ce fût très bien chez Mottow Soundz mais Il fallait passer une étape, se mettre en danger et explorer d'autres routes et connections. Il fallait se diriger vers quelque chose de plus pointu qui correspondait à cette nouvelle direction musicale plus radicale. Je suis très heureux et fier que Consouling Sounds ait accepté de nous signer.

Vous avez décidé de reconduire votre collaboration avec Déhà
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qui assure à nouveau le mixage de ce nouvel album. A-t-il une influence considérable sur le rendu studio de votre musique ?


Dee-J : J’ai toujours participé à tous les enregistrements et mixages. J’ai tout fais à l’époque avec Paul Delnoy, on mixait à deux. J’ai également mixé le live de notre reformation. Je commençais à en avoir marre d’avoir cette pression de tout devoir gérer. Avec Headhunter, j’avais déjà choisi de bosser avec Zeuss le producteur de Rob Zombie –ça collait parfaitement avec le concept du morceau. C’était un premier test de lâcher le bébé, afin de voir si j’en étais capable. J’étais un maniaque du contrôle, je n’ai jamais raté une heure d’enregistrement ou de mixage de toute la carrière de La Muerte
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.

Après ce premier test, Kirby a proposé Déhà
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qui avait déjà bossé sur Wolvennest
Wolvennest


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qui avait bien fonctionné. Ça a bien matché, il avait beaucoup d’idées sur le précédent album. Il travaille très vite. Je m’occupe encore de tous les enregistrements, à part les voix dont s’occupe Déhà
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.

Déhà
Déhà


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amène beaucoup d’idées au niveau du mixage, c’est intéressant. Il vient d’un autre monde que nous, c’est aussi intéressant. Sur le précédent album, j’avais travaillé sur le mixage avec lui car il était parti vers une direction qui ne correspondait pas à ce que je souhaitais. Sur Sortilegia, le problème ne s’est pas posé car Déhà
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savait déjà vers où nous voulions aller et il savait en raison de l’expérience précédente ce que j’attendais de lui. Il a mixé de son côté puis pour les corrections finales, j’avais accès à son ordinateur depuis chez moi et on a corrigé ensemble.

Marc du Marais : Sans Déhà
Déhà


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, pas de nouvel album. C'est le 6ème membre du groupe, il est à la base de ce mur sonique. Il nous a toujours soutenu dans nos choix, il est rapide et très intelligent. Il a la dextérité de diriger le metal en fusion et au niveau du chant, il est bourré d'idées. De plus, il est capable de tout jouer et chanter. Il te met à l'aise de la première à la dernière minute, je l'adore. Son aide et sa production ont été très importantes dans la construction de l'album.

Vous avez fait le choix de présenter et défendre votre nouveau méfait sur vos terres en retenant le Botanique comme lieu du crime. Avez-vous un attachement particulier avec cette salle ?

Dee-J : On n’a pas d’attachement particulier au Botanique étant donné qu’on a quand même fait huit fois l’Ancienne Belgique, on est plutôt à la maison à l’Ancienne Belgique. Je sais que le Botanique a toujours voulu que nous y allons jouer même s’ils connaissaient notre rapport avec l’Ancienne Belgique. Il se trouve que la situation fait qu’on avait la possibilité de le faire au Botanique donc pourquoi pas. On a un très bon souvenir de notre participation aux nuits du Botanique, dès lors nous nous sommes dit faisons le Botanique.

Marc du Marais : Cela reste l’une des salles phares de Bruxelles !
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AUTEUR : Renaud
Amateur de musique métal aux goûts éclectiques, il a rejoint l'équipe en vue de chroniquer diverses sorties d'album. Tu auras peut-être l'occasio...
Amateur de musique métal aux goûts éclectiques, il a rejoint l'équipe en vue de chroniquer diverses sorties d'album. Tu auras peut-être l'occasion de le croiser lors d'un concert à l'A.B., au Reflektor ou en festival. N'hésite pas à lui fait part de ton avis et des idées qui te viennent à l'esprit lors de la lecture de ces chroniques, il ...
Amateur de musique métal aux goûts éclectiques, il a rejoint l'équipe en vue de chroniquer diverses sorties d'album. Tu auras peut-être l'occasion de le croiser lors d'un concert à l'A.B., au Reflektor ou en festival. N'hésite pas à lui fait part de ton avis et des idées qui te viennent à l'esprit lors de la lecture de ces chroniques, il t'en sera reconnaissant....
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