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Skinheads 100% Antifascistes !!!

Interview de Martin...


Mardi 5 octobre 2010



1) Salut Martin, on peut dire que l'on s'est croisé dans des ruelles sombres de la cité ardente, et puis on a papoté..., tu m'as parlé de ta passion pour le ska et la oi!, peux tu nous rappeler l'historique de ces deux mouvements ?

Bon, je vais essayer de faire bref. Ce n’est pas un secret, le ska vient de Jamaïque, ce que moins de gens savent c'est que le ska est antérieur au reggae. Les débuts du ska se situent dans les années 50. On écoute à cette époque en Jamaïque du merengue, du calypso, du mento des musique typiques des Caraïbes influencées pas l'origine africaine de la majorité des habitants de l'ile. Ceux qui ont la chance d'avoir une radio (ou de connaitre quelqu'un qui en a une) écoutent aussi de la musique américaine, principalement du rhythm'n'blues et du jazz. La vie n'est pas facile pour les noirs en Jamaïque et le succès des artistes américains donnent de l'espoir et des idées aux jeunes des ghettos. Ils reproduisent ces morceaux en les mêlant à la musique qu'ils savent jouer, le ska prend vie petit à petit.
En même temps se développent les sound systems. C'est la meilleure façon pour les jamaïcains d'écouter les derniers tubes et les selecters se livrent une lutte acharnée pour attirer le plus de monde et passer les meilleurs disques en premier. Le sound system devient vite partie intégrante de la culture jamaïcaine et s'exporte en Angleterre par le biais de l'immigration. Au début des années 60, le ska devient un style (de danse et de musique) à part entière. Le nom viendrait de la manière sèche de jouer les accords à la guitare. Le ska est très vite et largement diffusé par les sound systems et devient le symbole musical de l'indépendance (la Jamaïque gagne son indépendance en 62).
En 64, le morceau "My boy lollipop" fait un tabac international et le ska va cartonner dans les charts anglais jusque la fin des années 60 et permettre à des maisons de disques mythiques de se développer (Trojan, Studio one, Blue beat,...) et à de nombreux artistes de se faire un nom (Prince Buster, Derrick Morgan, Baba Brooks, Don Drummond, Toots and the Maytals). La production est intensive et certaines semaines voient 200 singles sortir.
Puis il va tomber un peu dans l’oubli au profit du rocksteady puis du reggae.
Dans les années 80 la deuxième vague ska déferle avec des groupes comme Madness
Madness


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ou les Selecters, un ska plus "pop", plus british, mais fidèle aux origines: faire danser le public!
Le ska s'est imposé comme un style majeur et il existe beaucoup de styles de ska : des groupes ska-punk comme Voodoo Glow Skulls
Voodoo Glow Skulls


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, du ska plus skinhead comme 8°6 Crew
8°6 Crew


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ou Skoidats, des groupes plus "old school", je citerai Rocket Ship un très bon groupe liégeois, du ska jazz comme New York Ska Jazz Ensemble, pour ceux qui écoutent de la techno on peut même y retrouver la structure et le contre-temps caractéristiques du ska dans certains morceaux. Le ska est un style qui se base sur l'interprétation et il y a parfois des dizaines de versions du même morceau. D'ailleurs beaucoup de tubes de ska sont des reprises. Il y aurait encore plein de groupes qui mériteraient d'être cités, pour leur approche originale du ska ou simplement parce qu'ils sont très très bons, The Toasters
The Toasters


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, The Offenders, Scrapy, Jim Murple Memorial, The Caroloregians
The Caroloregians
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, Bad Manners
Bad Manners
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, The Upsessions, The Aggrolites
The Aggrolites


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, The Slackers
The Slackers


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, etc...

Je vais essayer de faire encore plus bref pour parler de la oi! Pas moyen de parler de oi! sans un petit historique de la culture skinhead. Les premiers skins apparaissent à la fin des années 60 (69 est l'année mythique du mouvement). En gros le look skinhead est un mix entre les mods anglais et les rude boys jamaïcains (l'immigration jamaïcaine est très forte en Angleterre dans ces années là). Cheveux très courts par rejet des hippies et parce que c'est plus pratique dans les bastons, chaussures de travail, vêtement casuals mais avec un minimum de classe. Les skins sont vite vus comme la gangrène de la jeunesse anglaise. A l'origine le mouvement n'est pas du tout politisé mais est issu principalement de la working class et est indéniablement multiculturel. Les skins n'ont pas encore de musique propre et écoutent du rhythm'n'blues, de la soul et bien sûr du ska. Le mouvement est très à la mode jusqu'au début des années 70 puis reprend des forces avec l'arrivée du punk. La musique brutale du punk plait vite aux skins mais ne leur correspond pas encore tout à fait. Se développe alors un style de punk joué et écouté par les skins: la oi! (hey men! en argot cockney). Plus simple, plus lent, c'est souvent des chansons "à boire" qui donnent envie de scander le refrain en levant sa bière, les textes abordent aussi les problèmes sociaux de l'Angleterre. Malheureusement un des premiers groupes de oi! voit vite dans cette musique une tribune politique puissante et l'utilise pour répandre des idées d'extrême-droite: Skrewdriver. Les skins qui n'avaient déjà pas bonne presse se retrouvent vite tous assimilés à des nazis au fur et à mesure que les skinheads d'extrême droite font parler d'eux à coup de ratonades et d'agressions racistes. La scission se crée entre les anti-racistes (ou simplement pas racistes) et les fachos. Aujourd'hui il y a principalement trois scènes oi!: ceux qui ne veulent pas prendre position "politiquement" et parlent de bière et de baston, les antifas de gauche radicale et l'extrême droite. Ces derniers sont une caricature des skinheads (et sont appelés « boneheads » par les autres) et n'ont pas grand chose à voir avec l'origine du mouvement.
Quelques noms de groupes oi! qui me viennent: Cock Sparrer
Cock Sparrer


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, 4-Skins, Angelic Upstarts, The Opressed, Hard Skin, Loikaemie, Runnin'riot, Stage Bottles, ...


2) Tu arborais fièrement sur ta veste un badge antifa et un du mouvement S.H.A.R.P., qui si je ne m'abuse fait partie du mouvement skinhead, peux tu nous éclairer là dessus ?

Ça c'est simple comme question. Je suis antifa depuis que j'ai 14-15 ans. J'ai jamais aimé les nazis et j'ai jamais aimé leur façon de se trouver des boucs émissaires sous prétexte de différence de peau, de lieu de naissance ou de religion. Moi ce sont les cons que j'aime pas et que je sache y en a autant de blancs que de noirs, jaunes ou marrons, hommes ou femmes. Le fascisme quel que soit son habillage n'est qu'une solution de facilité pour des gens qui ne savent pas regarder plus loin que le bout de leur nez. Le badge du SHARP (Skinheads Against Racial Prejudice - skinheads contre les préjugés racistes), je le porte parce que je suis skin et antiraciste et que c'est aussi une manière d'interpeller les gens sur la vraie origine du mouvement. Au premier abord y a parfois des gens qui me prennent pour un facho/raciste à cause de mes vêtements et de mon crane rasé. C'est une manière de dire « Oui je suis un skinhead et que non seulement je ne suis pas raciste mais qu'en plus je les aime vraiment mais alors vraiment pas ».



3) Peux tu nous parler de la scène ska en Belgique, les groupes, organisations, concerts ....??

En Wallonie la scène n’est pas très grande mais on a quelques très bons groupes. Je ne suis pas trop la scène ska-punk parce que c'est pas trop ma tasse de thé mais Up Vibes organise pas mal de concerts. Je conseille à tout le monde de voir au moins une fois les Rocket Ship qui jouent régulièrement à liège et The Caroloregians
The Caroloregians
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qui assurent à mort. En suivant de près l'agenda de l'AB et du Magasin 4, il y a moyen de dégoter quelques belles dates, beaucoup de groupes américains passent régulièrement par la Belgique. Le tipi à Liège inclut souvent des concerts ska dans sa prog.
Ça bouge beaucoup plus en Flandre (c'est pas une surprise) et le collectif Ska-Antwerpen a pas mal de très bonnes soirées à son actif.




4)Sinon Martin, peux tu te présenter aux lecteurs de Shoot Me Again, je sais que tu es un carolo d'origine, et que tu fais partie d'un collectif.....??

Ben donc je m'appelle Martin et comme tu viens de le dire je viens du pays noir. J'ai commencé à écouter du métal vers 14 ans grâce à mon papa fan de Led Zeppellin. J'ai passé pas mal de mercredis après midi dans les bacs de la médiathèque et après avoir écouté des classiques comme Iron Maiden
Iron Maiden


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, Sepultura
Sepultura


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et Metallica
Metallica


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, j'ai découvert le punk. Le style plus brutal, plus dépouillé m'a plus directement. De fil en aiguille j'en suis arrivé à croiser la scène redskins et à écouter des groupes comme Banlieue Rouge, j'ai rasé ma crête et arrêté de faire des trous dans mes pantalons. Il m'a fallut quelques années avant de découvrir et apprécier le ska roots, sans doute qu'avec l'âge je suis devenu plus ouvert.
Je crois que je suis assez ouvert musicalement mais j'aime les trucs qui vont à l'essentiel, je peux écouter du hip hop, du hard-core, de la techno, de la drum and bass, du ska, du reggae, du punk... mais il faut que se soit vrai et sans chichi.
Je suis bénévole à la distro de la zone et j'y passe pas mal de mes soirées du week-end, ce qui me permet de découvrir pas mal de groupes et de gens différents. Je fais partie de deux collectifs, Sharp Liège avec qui on organise un ou deux concerts par an et Root's rockers, un collectif de d’sj ska-punk-rockab, avec qui on a déjà fait quelques bonnes soirées.





5)J'aimerais avoir ton avis sur la scène underground en Wallonie ?

Je trouve que c'est une petite scène mais ce qui me plait c'est que ça nous oblige un peu à se mélanger. S’il y avait un concert de ska toutes les semaines je ne ferais que ça. C'est pas le cas, donc je passe beaucoup de week-ends à aller voir des groupes que je ne connais pas, de styles que j'apprécie moyennement. Ça permet de rencontrer des gens, de créer des liens et de ne pas rester chacun dans notre coin comme des cons.



6) Tu es allé à Londres voir un festival de oi!, tu m'as parlé de cette surprenante constatation que finalement il y avait très peu d'anglais, as tu eu des réponses à ce fait ?

Ben peut-être bien que le célèbre « nul n'est prophète en son pays » est de circonstance. Honnêtement, j'ai été plutôt surpris. Je pense que le fait que c'était un concert ouvertement antifa a fait bouger les plus motivés et que pour n'importe quel skin antifa, aller voir Oppressed en Angleterre c'est pas loin du pèlerinage, si tu vois ce que je veux dire. Peut-être que les gars du coin ont déjà vu Oppressed 15 fois et se déplacent plutôt pour des groupes étrangers. Je sais pas trop, mais c'est parfois la même chose à La Zone, quand passent de très bons groupes et qu'il y a pratiquement pas de liégeois dans la salle!


7)Que ce soit dans le Ska et encore plus dans la oi!, il y a un code vestimentaire assez pointu, peux tu nous en parler ?

Pour le ska je dirai qu’il n’y a pas vraiment de code particulier étant donné que c'est une musique écoutée par une grande diversité de gens, de milieux forts différents. Sur scène par contre, les groupes ont souvent tendance à porter le costard quand même ou une "tenue de scène". Par exemple la dernière fois que j'ai vu The Upsessions, ils portaient tous le même training vert coupe année 80. Pour la oi! c est bien sur plus pointu. Jean, boots ou adidas noires, polo, chemise à carreaux ou t-shirt de groupe et bien sur la célèbre harrington. Je ne parlerai pas de la coupe de cheveux ça me semble évident... Maintenant ça dépend bien sûr de ce que t'as prévu de ta soirée! Si je vais à une soirée ska j'aurai plutôt tendance à mettre une chemise et des chaussures pas trop lourdes pour danser toute la nuit. Si je vais voir un concert oi! ben je sortirai mes boots à coque pour garder mes orteils en bon état!



8)Martin, y-a-t-il des évènements à ne pas rater en matière de ska et de oi! en Belgique et en Europe ?

Ben faut faire un tour en Allemagne, y pas mal de bons festivals par la bas. Sinon ce w-e à Anvers une soirée qui promet d'être sympa: Soul boys vs Rude boys. Et quelque chose à ne pas rater si vous avez l'occasion de voir Aggrolites, ils passent régulièrement en Belgique. Faut absolument pas rater! Pas besoin d'être fan de ska pour apprécier!




9)Et pour conclure as tu des méchants coups de gueule à pousser ??

Ouaip, ça n’a pas grand chose à voir avec le reste de l'interview mais je suis allé à Bruxelles ce mercredi pour la manif contre les mesures d'austérité. J'avais l'intention de rejoindre le bloc anticapitaliste formé par les gens du No Border Camp. Pas de chance, nos chers amis les flics en ont décidé autrement...une grosse partie des gens quittant le camp ont été arrêtés "préventivement", même la brigade de clowns a été emmenée au poste et pas toujours de manière très délicate. Sur les 500 personnes se dirigeant vers la manif à peine la moitié y sont arrivés. Sur place les flics les ont encerclés, chargés et hop : colsons et direction le poste. Que les flics arrêtent préventivement, avant le moindre débordement des gens sous prétexte qu'ils ne pensent pas pareil ça me met déjà les nerfs mais ce qui me met hors de moi c’est la réaction des responsables syndicaux qui ont empêché la base d'intervenir pour aider les manifestants du No border camp! Un petit lien qui en dit plus que ce que je pourrais écrire :

https://www.youtube.com/watch?v=-IU7PIk6kV4

J'en profite aussi pour faire un petit clin d'oeil à mes potes de Ké Crass Production qui viennent de sortir deux petits courts métrages que je vous conseille vivement!

https://www.youtube.com/watch?v=dWDLOA8NaoA

https://www.youtube.com/watch?v=VqdQTX0w_0w
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