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Un concert, c’est quoi, déjà ?

Mercredi 29 juillet 2020

D’abord, compte tenu des indicateurs épidémiologiques, le 23 juillet dernier, le Conseil national de sécurité (CNS) a décidé de ne pas activer la phase 5 du déconfinement et donc de ne pas doubler la capacité maximum pour les événements qui seraient passés de 200 à 400 personnes à l'intérieur et de 400 à 800 personnes en extérieur.
Ensuite, lors de la réunion du 27 juillet, le CNS a décidé que les évènements en public étaient limités à 100 personnes à l’intérieur et à 200 en extérieur.
Bam !
Pourtant, le secteur de la musique espérait…
Et vous, artistes, organisateur·trices, fans, etc. qu’est-ce que ça vous inspire tout ça ? Vous êtes prêt·es à retourner en concerts, sur scène et/ou à réinventer la musique live ?


Crédit photo: Frederic Brichau

« Le secteur musical veut savoir quand les salles pourront rouvrir, explique Claire Monville, directrice du Conseil de la musique. On attend, mois par mois. Les concerts de l’été ont été reprogrammés à la rentrée de septembre. Maintenant, plusieurs de ces évènements sont annulés ou encore reportés car les choses ne s’annoncent pas bien. On voudrait entendre « recommencez vos activités et s’il y a un problème, on arrêtera tout ». Le secteur musical a besoin de perspectives pour pouvoir se réinventer. On se réunit, on réfléchit, on fait remonter des infos mais la situation est assez inquiétante. Il n’y a aucune possibilité de se projeter dans l’avenir, proche ou lointain. »
Claire ajoute que l’annonce du CNS du 27 juillet donne encore moins de perspectives à l'ensemble du secteur et que cela devient très anxiogène et très déprimant. « Jusqu'à maintenant, on cherchait des solutions pour adapter, déplacer les choses. Depuis hier, c'est un peu difficile d'y croire... », précise-t-elle.

Une proximité mise à rude épreuve

Après quatre mois d’inactivité, c’est notre photographe Frederic Brichau qui a été le premier de l’équipe à retourner sur le terrain pour ramener du contenu photo sur notre site, le 20 juillet dernier au Théâtre de Verdure à Namur. 400 personnes réparties en bulles (c’était donc avant les nouvelles directives du 27 juillet). Il m’a résumé cette soirée par le mot « bizarre ».
« Cet évènement représentait quelque chose de concret par rapport à cette transition qui doit s’opérer, dit-il. Si tu viens avec ta bulle, finalement, ce concert ne doit pas trop se vivre différemment. Si tu viens en petit comité en espérant socialement échanger, c’est loupé ! Un élément qui aide à comprendre pourquoi ça semble difficile de rouvrir les salles c’est que le volume sonore oblige à se rapprocher et à se parler très… très … très près de l’autre, de son visage. Le masque étant aussi une barrière sonore, il tombe souvent par réflexe pour se faire entendre. »



Du côté de l’organisation, le bilan est positif. Virginie Gorin de l’ASBL Panama (Belvédère) m’explique que le plus compliqué a été la mise en place des normes sanitaires. Définition des bulles sociales, mise en place des sens de circulation, mise à disposition de gel hydroalcoolique à des endroits stratégiques, port du masque pour l'ensemble des bénévoles, etc.
« On a pu s'y retrouver financièrement, poursuit Virginie, grâce aux différents partenariats et à tous nos bénévoles qui n'ont pas compté leurs heures pour aider au montage, grimper les gradins pour servir le public et aider au démontage le soir même ! Notre tarif solidaire a également eu un succès fou, à peu près 50%. Malgré la crise, les gens sont généreux, ça aide aussi. Nous avons reçu beaucoup de messages positifs à la suite de concert, cela nous motive encore plus pour la suite. Réinventer la musique live, nous ne savons pas mais en tout cas, d'autres dates sont prévues d'ici la fin de l'été. »

Romano Nervoso
Romano Nervoso


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était super emballé de remonter sur scène. Une seule inquiétude pour le chanteur Giacomo Panaris, le public situé à 50 mètres de la scène alors que l’artiste a l’habitude d’être très proche de lui. Problème assez vite réglé puisqu’à partir du 6e morceau, le chanteur s’est rapproché du public et le concert a pris une autre tournure.
« Il faudra lutter et se battre pour revenir à ce que les concerts étaient avant la crise du covid19, ajoute Giacomo. Par exemple, pendant le confinement, je n'ai pas fait ou regardé de concert en streaming, car je trouve ça très chiant, impersonnel et pas du tout excitant. Plusieurs groupes ont joué la carte du streaming, pour moi, c'est une erreur car l'état pourrait l'utiliser contre nous, genre ''malgré tout, vous pouvez faire des concerts et récolter de la tune via des dons'' et évidemment, on sait très bien que ça ne marche pas. »

Ce qui est passé, c’est bon. Ce qui est à venir, c’est à voir.

Le Festival Rockelingen s’est déroulé les 24 et 25 juillet derniers à Edingen. Le team ne s’est pas trop posé de questions au niveau de l’organisation. 200 personnes ont réservés leur tickets au préalable et tout a été mis en place pour respecter les mesures sanitaires.
Les organisateurs avouent que les préparatifs ont été bizarres, différents, fous ! Cette édition leur a demandé beaucoup de travail, des maux de tête, des recherches de solutions sécuritaires pour toutes sortes de choses mais tout s’est très bien déroulé, au niveau des groupes, du public et des bénévoles.


Crédit photo: Elodie

Le Catacombfest Open Air qui était programmé le 14 août 2020 à Anvers vient d’être annulé, suite à des mesures de sécurité prises par la ville d’Anvers. Avant de devoir annuler, Noydens Karen et Dirk Broeren m’avaient confié n’avoir eu aucune hésitation pour mettre sur pieds cette édition particulière. Ils m’expliquaient que tout le monde était très heureux de pouvoir organiser quelque chose. Les groupes étaient motivés et le staff faisait tout son possible pour que tout se passe dans les meilleures conditions, pour tout le monde. « Cette année, poursuivent Noydens et Dirk, nous fournissions des toilettes avec une chasse d’eau, du gel pour les mains et des masques buccaux. Les entrées et sorties étaient séparées. Entre les concerts, le groupe qui joue et le groupe qui doit jouer avaient l’espace et le temps pour ranger ou installer le matériel. Après chaque show, il était prévu de désinfecter la scène. Les chanteurs devaient utiliser leur propre micro. Les risques financiers étaient limités grâce aux réservations par bulles. Le fest était sold out. »

Au niveau du KulturA, des concerts sont prévus à partir d’octobre. « En gros, précise Jean-François Jaspers, on espérait des assouplissements dans les mesures. Du coup, il est peu probable que les évents annoncés puissent avoir lieu. On garde un peu d'espoir et on fera le point mi-août en fonction de l'évolution de l'épidémie et des mesures prises par le CNS, mais ça ne s'annonce pas très réjouissant. »

Autre organisation, Collectif Mental qui reprend ses activités le 25 septembre 2020 avec Wyatt E.
Wyatt E.


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, Des Yeux
Des Yeux


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et Meander
Meander


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au Bunker Ciné Théâtre à Bruxelles. Concert initialement prévu le 1e mai avec le duo allemand Grin
Grin


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en tête d'affiche et les Bruxellois de Des Yeux
Des Yeux


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et Meander
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en ouverture. Grin
Grin


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ayant annulé sa tournée, l’équipe a décidé de garder la date avec une nouvelle tête d'affiche belge, Wyatt E.
Wyatt E.


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. « Pour l'instant, explique Elodie, on ne sait pas comment la situation va tourner mais on se conformera évidemment aux recommandations légales. Le port du masque sera sans doute obligatoire dans la salle, qui est séparée du bar. »

Live ou virtuel ou masqué ?

Des Yeux
Des Yeux


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est donc un des groupes programmés le 25 septembre. Le sentiment des membres du groupe est entre excitation et perplexité. Pour l'instant, Albin, le guitariste, m’avoue ne pas trop y croire. « Depuis qu'on a repris les répètes en mai, dit-il, on a bossé sur un set normal, comme si de rien n'était. Depuis la semaine dernière, on teste la possibilité de jouer en portant des masques. Donc nous répétons masqués. La bonne nouvelle, c'est que c'est gérable. Ce n'est pas idéal, on transpire comme des porcs, mais c'est faisable. Il reste à régler la question de la voix avec un masque, mais c'est plus un détail technique. On va gérer. »
Albin me confie que les règles de distanciation physique vont peut-être apporter une dimension différente au rendu en live. Il pense que ça ne posera pas un problème particulier pour son groupe. Il s’explique : « On bouge pas mal sur scène, mais le public est toujours statique. Même un concert où le public serait assis ne me dérange pas outre mesure. »



Pour Julien Truchau de Benighted
Benighted


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, la musique est quelque chose qui doit être vécu en live, avec les échanges qui s’installent avec le public, l’ambiance, le son, et tout ce qui se passe avant et après le concert. « Je vois plein de groupes qui se mettent au livestream, explique Julien. C’est quelque chose que je n’imagine pas du tout pour Benighted
Benighted


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. Si c’est le nouveau format des « concerts », je pense que j’arrêterais purement et simplement le groupe. Le livestream pour moi, c’est l’équivalent des films pornos dont se satisfont ceux qui ne peuvent pas de relations sexuelles ! (rires) »

Le groupe a sorti un nouvel album en avril dernier et, comme beaucoup, n’a pas encore eu l’occasion de présenter les nouveaux titres sur scène. Cela est prévu le 8 octobre au MCP Apache. Julien me précise que les membres du groupe vont arriver sur scène comme des morts de faim hyper motivés. « Bien sûr, poursuit Julien, nous sommes inquiets de l’évolution des choses jusqu’à cette date, car il est impossible de prévoir la situation sanitaire à l’avance et les législations mises en place qui permettront ou non que les dates aient lieu. »

Jérôme Bernard, le chanteur de Pestifer
Pestifer


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, pense aussi que les livestream et autres concerts virtuels ne sont pas pour lui. « On remontera sur de vrais planches avec un vrai public et de vrais bières, dit-il, dès que les circonstances le permettront. » C’est prévu pour le 26 septembre prochain à La Zone pour la release party. Jérôme me dit aussi qu’il trouve que les règles sont beaucoup moins strictes pour d’autres types de divertissements. Il poursuit : « Globalement, je constate que les règles ne sont pas correctement respectées. Nous serons toujours contents de pouvoir donner de notre énergie sur scène pour un public, aussi réduit soit-il. Il va falloir faire preuve de discipline pour pouvoir récupérer nos bons vieux concerts. »



Un public impatient mais prudent

Pascal Paridans attend. Il préfère la patience et la prudence, pour le moment. Si c’est pour voir un groupe dans une salle avec beaucoup de restrictions, il pense que ce n’est pas génial, pour lui comme pour les artistes. « Je pense que l’on va vers une autre façon de voir des groupes, ajoute Pascal. Un live sans publique ce n’ est pas la même chose. Ou est l’impro, le plaisir d’être devant nos artistes préférés ? Je suis pessimiste pour tous nos petits groupe. »

Isabelle Orban est, elle, impatiente. Le retour en concert est prévu pour fin septembre, si tout va bien. « C'est un petit concert, dit-elle, je n'ai pas peur je sais que les organisateurs devront certainement se soumettre à certaines règles, juste peur que ça n'ait pas lieu car ça devient long. Il faudra s'adapter mais rien ne vaut un bon live. »

Idem pour Saïd Al-Haddad. Dès qu'il y a moyen, il y retourne, en scaphandre s'il le faut. Il m’avoue quand même être un peu inquiet parce qu’il trouve que trop de gens prennent le truc à la légère. Il poursuit : « Je pense que le public rock/metal sera moins inconscient. Peut-être parce que la moyenne d'âge est en général plus élevée. La musique live comme nous l'entendons, la voyons, la percevons, sera toujours là. Les phénomènes de live à huit clos en stream seront peut-être une nouvelle voix mais pas un remplacement. »



Audrey Di Troia a déjà assisté à plusieurs concerts. « Il y a peu de possibilités en Wallonie, poursuit Audrey. Donc, il faut bouger en Flandre ou à Bruxelles. Majoritairement des concerts en terrasse, dans des squares, etc. Si ça doit continuer comme ça, oui, ça va être problématique. Le temps en Belgique ne permettra pas de continuer à organiser des concerts en extérieur. Pour moi, un concert c’est debout. On est en train de se dire que les salles ne vont pas pouvoir rouvrir avant 2021 et c’est une catastrophe. »

Et l’équipe SMA ?

Eh bien nous, on est impatient de retourner en concert, certain·es l’ont d’ailleurs déjà fait. Non sans inquiétude et questionnement. Renaud Linguelet se demande jusqu’à quel point le plaisir sera altéré avec la distanciation sociale et le port du masque. « Quelle place restera-t-il pour l'échange avec les autres ?, poursuit-il. C'est aussi ça un concert. Je rêve d'aller jouer des coudes dans le pit et rentrer chez moi le t-shirt mouillé, mais ce n'est hélas pas pour bientôt. »

D’autres comme Jürgen Bruynooghe s’interrogent sur les conditions dans lesquelles ils vont pouvoir (ou pas) prendre des photos. « Si ce sont des concerts où il faut rester assis, explique Jürgen, est-ce qu'on peut shooter devant la scène, ou plutôt du fond? Et quel sera l'atmosphère à ces concerts? Par exemple, je ne crois pas que tout le monde restera assis pendant un concert metal ou hardcore. »

Plusieurs membres de l’équipe vont profiter de cette situation pour se recentrer sur l'underground, la scène locale et les petites structures.
Fred pense que le secteur va très certainement devoir évoluer et que la consommation culturelle est face à de nouveaux défis, de nouveaux repères à construire. À voir.
Concert ? Pas concert ? Quand ? Où ? Comment ? On n’en sait trop rien, en fait. Mais ce qui est certain c’est que, même s’il manque un fameux quelque chose, tous les maillons de la chaîne sont là, en attente éveillée, au taquet !
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AUTEUR : Isabelle
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup...
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière ve...
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière vers un autre secteur et qu’elle est devenue terriblement en manque… d’écriture. A rejoint l’équipe en ju...
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière vers un autre secteur et qu’elle est devenue terriblement en manque… d’écriture. A rejoint l’équipe en juillet 2016....
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière vers un autre secteur et qu’elle est devenue terriblement en manque… d’écriture. A rejoint l’équipe en juillet 2016....

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TYHUIFE - 21-08-2020, 01:11
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