Reportage

Primitive Man : Funérailles dans la Caverne

Bruxelles (Botanique), le 13-06-2023

Mardi 20 juin 2023



Pendant que KISS donnait son énième concert d’adieu au Palais 12 et que Tenacious D s’éclatait du côté de Forest National, c’est à une tout autre poésie que nous avons eu affaire en ce torride mardi soir de juin. La Rotonde du Botanique accueillait en son sein l'un des fleurons de la scène doom de Denver à savoir Primitive Man
Primitive Man


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. Ethan McCarthy et sa bande ont délivré une prestation sans concession, racée et d’une noirceur éclatante. Ayant sorti récemment un projet commun (« Suffocating Hallucination ») avec leurs compatriotes de Full of Hell, le groupe a donc profité de quelques dates entre deux festivals afin de rôder leur spectacle et offrir un set chaotique aux âmes égarées qui se trouvaient là…


C'est tout d'abord Fvnerals
Fvnerals


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qui nous est proposé en guise d'amuse-bouche. Fondée à Brighton par un duo belgo-suédois composé de Syd Scarlet et Tiffany Ström, la formation, qui vient de sortir son troisième album (« Let The Earth Be Silent »), a pas mal baroudé et s'est établie dans plusieurs villes durant ces dix dernières années. Une influence internationale au service d'une musique mêlant post-rock, shoegaze et dark ambient sous le couvert de guitares lourdes et d'incantations occultes : demandez l'programme ! Dès notre entrée dans cette Rotonde climatisée (Dieu merci !), nous nous retrouvons immédiatement plongé.e.s au cœur d'un cocon à l'atmosphère glaçante. De lentes nappes de guitare dronesque nous enveloppent soigneusement jusqu'à nous plonger brièvement dans un état d'étourdissement maîtrisé. La basse et la batterie naviguent en eaux troubles et accentuent un peu plus ce rythme certes ralenti mais qui n'en demeure pas moins pesant. Fort heureusement, la voix épurée et sibylline de Tiffany Ström apporte malgré tout un soupçon d'espoir dans cet enchevêtrement sonore suintant souffrance et misère. Durant la courte durée du show, le band soigne la présentation à l'aide de ce rétroprojecteur placé devant le batteur et diffusant çà et là des illustrations de paysages éthérés mais à la sombre beauté. À l'image de cette plage déserte et ce soleil déclinant, le caractère déprimant de chaque élément pactise néanmoins avec cette ambiance excitante et édifiante permettant au spectateur de rêver, tout en restant intrigué par ce qui pourrait lui arriver. C’est tout simplement prenant et le secret du combo réside dans l'utilisation d'un espace de respiration nécessaire entre chaque trémolo de guitare, chaque élément percussif, chaque chant scandé délicatement. Fvnerals
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suit indéniablement les traces d'un Dead Can Dance torturé, vous faisant ressentir un tourbillon d'émotions porté par des paysages sonores délicieusement lugubres et où la tension n’est jamais loin d’exploser… Bouleversant et intense !



Après une courte pause rafraîchissante, place à la lourdeur et la décrépitude que les doomeux de Primitive Man
Primitive Man


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vont nous servir à grandes rasades aigres et corsées à souhait. Si leur projet de faire le sludge/doom le plus abyssal du monde n’était pas loin d’être cliché à leurs débuts, ils ont su faire évoluer leur propos à l’aide d’un son excessivement crade, dérangeant, poussé à l’excès, impitoyable ambassadeur d’une longue et morne vie de haine, de douleur, de misère et de destruction. Fidèle à sa réputation, le trio déboule sur scène presque timidement et balance la sauce avec The Lifer aux éructations putrides, à la basse abrasive et aux fracas dantesques nous embarquant dans une tempête aux proportions sismiques. Ethan McCarthy (guitare), à l’allure imposante et dont les yeux rivés vers les cieux s’embrasent instantanément, beugle de toutes ses forces et laisse échapper une rage contenue jusqu’alors, ne laissant aucun doute sur ses intentions. Le bassiste Jonathan Campos veille sereinement sur l’assemblée avec une sagesse silencieuse tandis que le batteur Joe Linden complète le triangle en martelant ses fûts sur des tempos lents et primaires. Ce dernier laisse ensuite ses deux compères chauves triturer leurs engins à antennes placés non loin d’eux durant un court moment d’improvisation noise au cours duquel on s’amusera des allées et venues de l’ingénieur du son, le pauvre homme se demandant quelle pouvait bien être son utilité dans ce marasme strident. La terrifiante et funeste spirale dans laquelle Primitive Man nous entortille est fort bien aidée par une utilisation de lights discrets et hypnotiques. La dépravation sonore reprend de plus belle avec Entity à l’intro pétrifiante et cette guitare qui vous met les nerfs à vif tel un essaim infernal, bourdonnant sans arrêt et vous recouvrant entièrement sans que vous ne puissiez vous en défaire. La grosse caisse prend au dépourvu et crée à elle seule une tension suffocante avant d’être rattrapée par ces cris gutturaux sortis des abîmes.



Il est certes bien laborieux de faire bouger le public sur des tempos aussi traînants mais le trio n’en a cure et prend tout son temps pour la suite des festivités. Pourquoi changer une recette gagnante ? On prend un riff, on l’étire, on y appose une batterie minimaliste, une basse vrombissante et on laisse l’auditeur face à ce chant funèbre évoquant dégoût et colère. Si Consumption tente une petite pointe de vitesse, ce semblant d’élan frénétique ne tarde pas à tomber de la falaise laissant nos pauvres esprits en lambeaux. C’est viscéral, négligent, plombant de bout en bout… La voix caverneuse d’Ethan n’est alors plus que le seul fil conducteur qui nous accompagne jusqu’aux portes des limbes. Et c’est sur Victim que l’on prend congé du gang du Colorado.

45 minutes : il n’en fallait pas plus, il n’en fallait pas moins. On a bien failli passer trois sales quarts d’heure durant lesquels notre santé mentale a longtemps été sur la corde raide mais l’Homme Primitif, beau joueur, nous a permis de sortir de sa sombre caverne afin de retrouver le soleil couchant… Et ça, c’est vraiment cro-mignon !

Remerciements au Botanique
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AUTEUR : Panda
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, pas...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...
Mordu de concerts depuis de nombreuses années, Panda aime écumer les salles, clubs et festivals de tout le pays. Bibliothécaire-documentaliste, passionné d'Histoire, de théâtre, de bande dessinée et de football, il est très (voire trop) éclectique dans ses goûts musicaux (metal/rock mais aussi pop, folk, new wave, electro). Il a rejoint l'équipe de SMA en février 2016 en tant que chroniqueur de concerts désireux de partager ses expériences live ! ...

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