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Streaming or not streaming ?

Mardi 20 avril 2021

Nous écoutons toutes et tous de la musique sur des plateformes de streaming. Sans forcément savoir ce qui se cache derrière, notamment pour les artistes.
Pour entamer les débats, nous avons lancé un micro sondage sur notre page Facebook. Il en ressort que 73% des répondant·es utilisent Spotify, 33% Bandcamp, 24% YouTube, 5% Apple Music et Tidal, 3% Deezer et 2% d’autres plateformes. Des tendances qui nous interpellent quelque peu et qui ont poussé plusieurs membres de l’équipe (Reshma, Rosie, Isabelle, Pierre et Olivier) à creuser le sujet pour comprendre comment fonctionne le streaming musical dans la sphère alternative et underground. Nos actes et nos habitudes de consommation jouent un rôle évident dans tout ce « bazar ».
Malgré le fait que le commun des mortels (aka les non-musicien·es) raffolent de ces plateformes, peut-on vraiment ne jurer que par elles une fois qu’on est informé.es de l’envers du décor ?



Crédit photo : Philippe Put - (CC BY-ND 2.0)

Un peu d’histoire : du vinyle au streaming

Jusqu’au début des années 1980, la musique était exclusivement analogique. Elle était toujours très majoritairement commercialisée via le procédé mis au point par Thomas Edison en 1877, c’est-à-dire gravée sur vinyle, ou, à partir des années 1970, sur cassettes pré-enregistrées. Et quand on voulait écouter une musique que l’on ne possédait pas sur l’un ou l’autre de ces supports, il restait la radio (mais on ne choisissait pas ce que l’on entendait), ou le disquaire chez qui il était le plus souvent possible de découvrir quelques minutes d’un enregistrement qu’on finissait généralement par acheter.

Pour en arriver au streaming de masse que l’on connaît aujourd’hui (358 millions d’abonné·es payant·es recensé·es dans le monde en 2019 (1)), il a fallu passer par une étape essentielle : la dématérialisation de la musique. Celle-ci s’est faite en 3 temps.

Tout d’abord, le lancement du CD en 1982 qui a introduit le principe de fichiers audionumériques (fichiers qu’on pourra très simplement et rapidement extraire et dupliquer fidèlement à l’infini, lorsque l’informatique personnelle se démocratisera). Pour ce qui est d’une éventuelle diffusion en ligne, un problème subsistait : ces fichiers audionumériques étaient volumineux. Un CD qui dure 70 minutes pesait environ 700 Mo, c’est beaucoup au regard des connexions internet de l’époque dont les performances étaient très éloignées de celles que nous connaissons aujourd’hui.

L’obstacle a cependant été vite surmonté, grâce à une équipe de chercheurs Allemands qui a développé une technique de compression qui divise le poids original d’un fichier audio par presque 10. Le MP3, auquel personne ne croyait, les maisons de disques les premières, est né en 1987, avant d’être lancé véritablement en 1993 et de devenir l’incontournable que l’on sait.

Dès lors, il ne manquait plus que l’outil qui permettrait de les diffuser largement en ligne ; cela sera chose faite en 1999, avec l’arrivée de Napster, la plateforme de peer-to-peer créée par Shawn Fanning, un ado de 18 ans, qui allait filer des crises d’urticaire aigües à Lars Ulrich et à quelques autres.

Il est intéressant de noter que l’ancêtre des plateformes de streaming était à l’origine un espace complètement libre, autogéré, alimenté et entretenu par une communauté qui comptait tout de même quelque 20 millions d’utilisateur·rices un an après sa création… Bref, un modèle socio-économique aux antipodes de ce que Spotify et consorts allaient développer plus tard…

Spotify, côté technique

Fondé en 2006 par Daniel Ek, Spotify s’est peu à peu posé en leader mondial du streaming musical. Si la plateforme suédoise attire un nombre sans cesse croissant d’utilisateur·trices, les musicien·nes qui l’alimentent avec leurs œuvres sont majoritairement très critiques à son égard.



Du côté de la technique, tout d’abord, Spotify a opté pour le format libre Ogg Vorbis et des flux audios à 320 kbit/s pour ses abonné·es premium et à 160 kbit/s pour les autres. Si les performances sont globalement supérieures à celles du MP3, on reste évidemment très en deçà du confort d’écoute que procure un système audio Hi-Fi. La qualité de diffusion des œuvres sur Spotify est régulièrement décriée, particulièrement celle réservée aux utilisateur·trices non payant·es.

« C’est d’ailleurs le motif invoqué par Neil Young lorsqu’il a quitté les plateformes de streaming en 2015, promettant toutefois que si la qualité revenait il reconsidèrerait sa position. Six ans plus tard, de nombreux albums du vieux Neil ont opéré un retour remarqué sur la plateforme suédoise. »

Le codec audio étant toujours le même, on peut penser que le rocker au cheval fou s’est depuis résigné à faire avec (la piètre qualité) plutôt que sans (ses quelque 6 millions d’auditeur·trices par mois…).

Notons encore que le recours à cette compression qui fait mal aux oreilles n’est pas spécifique à Spotify. À l’exception des plateformes Tidal (streaming musical suédois fondé en 2014) et Qobuz (streaming musical français fondé en 2007), toutes les plateformes de streaming utilisent l’une ou l’autre techniques permettant de réduire la taille des fichiers audionumériques qu’elles inscrivent à leur catalogue. Apple Music utilise son propre format. Deezer, le pendant français de Spotify apparu en 2007, reste attaché au MP3. Une percée qualitative est toutefois à signaler, la plateforme française propose, depuis fin 2017, une formule « Hi-Fi » (streaming de haute qualité) moyennant une augmentation de 50% du montant de son abonnement. À l’heure où nous écrivons ces lignes, Spotify s’apprêterait à déployer une formule similaire, mais la liste des pays concernés et le montant de l’abonnement n’ont pas encore été dévoilés.

Spotify, côté artistes

Si la qualité d’écoute sur Spotify est aussi mauvaise que certain·es le dénoncent, comment se fait-il que la plateforme comptabilise à l’heure actuelle 155 millions d’abonné·es payant·es et 190 millions d’abonné·es gratuit·es (2) ?

Selon Nele Buys, co-fondatrice du label Consouling Sounds , il convient de distinguer deux catégories d’auditeur·trices : les collectionneur·euses et les consommateur·trices. Les premier·es et les second·es développant une approche totalement différente de la musique. Les collectionneur·euses envisageront la musique comme une activité à part entière (on écoute et on ne fait rien d’autre, auquel cas on dispose généralement du système audio adapté). Pour les consommateur·trices, la musique fera plutôt office de bruit de fond (on écoute en faisant autre chose, et, là, Spotify fait très bien l’affaire). Selon Nele, cette typologie a toujours existé, la digitalisation n’a fait que la rendre plus visible. Elle note ainsi que le public Consouling Sounds se tournera plus volontiers vers Bandcamp, car la musique qu’il aime n’est pas toujours disponible sur Spotify, et, surtout, il a la sensation de se trouver en terrain étranger sur cette plateforme hyper généraliste et ses plus de 60 millions de titres disponibles.

C’est toutefois lorsqu’on se décide à parler argent que ça achoppe le plus. En effet, selon le calculateur de royalties élaboré par Dittomusic (3), un·e artiste qui totalise 10.000 streams sur Spotify perçoit un montant d’environ 35 €. Des disparités subsistent suivant les pays et les législations en vigueur, sans toutefois entraîner de variation vraiment significative.



En Belgique, le salaire mensuel minimum s’élève à 1340 € nets pour une personne seule travaillant à temps plein. Pour obtenir une telle rémunération de la part de Spotify, un·e musicien·ne doit cumuler un peu plus de 380.000 streams par mois. Mission impossible ?


« Pour mémoire, le débat avait été (re)lancé en 2017 par Geoff Barrow, membre de Portishead
Portishead


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et de Beak, qui dans un tweet demandait aux musicien·nes : « Combien d’entre vous ont personnellement reçu plus de 500 £ de la part de Spotify ? ». »


Will Toledo, l’homme qui pilote seul Car Seat Headrest
Car Seat Headrest


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, lui avait répondu par le même canal, indiquant que depuis 2013 il avait perçu quasiment 30.000 de la part de Spotify, assurant que cela lui permettait de subsister (4).
Car Seat Headrest
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est-il un phénomène isolé ? Difficile à dire. En tout cas, Will Toledo est, à notre connaissance, le seul à avoir répondu positivement à la question lancée par Geoff Barrow. On constate aussi que les plus fervents détracteurs du streaming en général (Thom Yorke en tête, Alex Van Halen
Van Halen


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ou encore Jimmy Page et Robert Smith plus récemment) appartiennent à une génération de musicien·nes dont la carrière a démarré bien avant l’apparition des mastodontes du streaming.

En attendant, face au vent de contestation qui souffle sans discontinuer, la direction de Spotify clame haut et fort qu’elle reverse 70% de ses revenus aux ayants droit. Mais, comme le note Quentin Anciaux dans l’excellent et très complet cahier Musicien.ne : quelques réalités du métier publié par Smart (5), le problème vient aussi du fait que « certains artistes sont liés par des contrats d’un autre temps à leurs maisons de production, ce qui peut amener à des situations où un artiste ne touchera que 10% de ce que va toucher le label, qui ne touchera lui-même qu’une partie des 70% redistribués... ».

Et comme ce vent de contestation n’en finit décidément pas de souffler, Spotify vient tout juste de lancer une nouvelle plateforme destinée à… expliquer pourquoi elle est une plateforme qui rémunère si mal les artistes. Quand on a besoin de se justifier comme ça, généralement…
Tout dernièrement, le 16 avril 2021, Apple Music a adressé une lettre ouverte aux artistes. La plateforme américaine y dévoile notamment la rémunération qu’elle leur accorde, qui s’élèverait en moyenne à 0,01 par stream, soit environ le double de ce qu’offre Spotify. Elle ajoute également qu’elle refuse de pratiquer un système similaire au Discovery Mode initié par Spotify, qui permet aux artistes d’être mis en avant moyennant une rémunération (encore) plus faible. La concurrence entre plateformes de streaming semble donc s’organiser autour de la question de la rémunération. Reste à savoir si le travail des musicien.nes sera un peu mieux considéré à l’avenir.

Les artistes sont là pour faire gagner de l’argent, pas pour en gagner eux-mêmes !

Du coté des artistes, tout le monde (en tout cas celles et ceux à qui nous avons posé la question) est d’accord pour dire que les plateformes de streaming sont un mal nécessaire pour être visible et accessible et que certaines seraient plus respectueuses des artistes que d’autres.



Par exemple, les albums de The K.
The K.


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et Wyatt E.
Wyatt E.


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sont distribués en physique et en digital par le label. « Le streaming c’est un peu le passage obligé, précise Sébastien Von Landau . Tout le monde y est. Il faut y être pour être vu. L’inconvénient est évidemment la rémunération des artistes. »

Comme Reshma de Neptunian Maximalism
Neptunian Maximalism


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nous le rappelle : « L’argent n’est pas justement distribué sur la majorité des plateformes. » Elle poursuit en disant qu’elle aimerait que l’artiste puisse être justement payé, qu’il existe un fair-trade artistique.

Nele Buys ajoute qu’il il faut toujours partir du principe que Spotify vous rendra rarement riche. « En tant que label, précise t-elle, diffuser de la musique sur une plateforme de streaming représente plus un investissement qu’une source de revenus. Néanmoins, il est important que Consouling Sounds soit présent sur Spotify car si notre public de collectionneurs est certes plus porté à fouiner dans les bacs des disquaires, il passe aussi, de temps à autre, par les plateformes de streaming. » Un point de vue que partage Corvus Von Burtle de Wolvennest
Wolvennest


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, pour qui le streaming « est un mal nécessaire ».

Au-delà de la rémunération imposée aux artistes, c’est la position de Daniel Ek qui interpelle. Dans une récente interview à music:)ally (6), il avançait en effet que le modèle du musicien qui sort un disque tous les 3-4 ans est probablement révolu, sous-entendu qu’il faudra dorénavant être plus productif ! Ce qui lui a aussitôt valu une volée de bois vert, largement orchestrée par Thom Yorke et Geoff Barrow. Car, dès lors, quid de la liberté de créer (et de ne pas créer) ? quid de la pluralité des formes d’expression artistique ? quid de l’exception culturelle ?

Mais, Céline Mazay de Bleedskin
Bleedskin


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note qu’en s’inscrivant sur ces plateformes, on connait d’emblée les règles du jeu. De par leur modèle économique, elles s’approprient la musique des artistes et une partie conséquente de leurs revenus. « Pour ma part, ajoute-t-elle, je souhaite que le public s’approprie ma musique et qu’il l’écoute. L’avantage est qu’on peut toucher énormément de personnes dans le monde. »

Franck Lorent de Sabathan
Sabathan


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estime en revanche que les artistes underground sont carrément mis de côté sur ce genre de plateformes et qu’ils ne touchent pas un rond. « Allez dans les concerts, dit-il, achetez du merch, rien ne remplacera jamais cet échange le plus loyal possible. Achetez de la musique sur des supports physiques, faites vivre la scène et les artistes. Ou alors téléchargez leurs albums sur leur Bandcamp respectifs, mais cessez de payer pour Spotify, Deezer, etc. »

Bandcamp, la panacée ?

Intéressons-nous maintenant à Bandcamp qui arrive en deuxième position des plateformes utilisées dans notre micro sondage. Plusieurs artistes nous ont confié que, depuis le début de la pandémie en mars 2020, Bandcamp leur offre la possibilité de réaliser des livestreams payants à défaut de pouvoir se produire en concert depuis plus d’un an. A cette même période, la plateforme a également mis en place les Bandcamp Fridays : chaque premier vendredi du mois, ils reversent 100 % du profit aux artistes.
Bandcamp est né en 2008, après la réflexion de son créateur, Ethan Diamond, sur la rémunération insuffisante des plateformes de streaming envers les artistes.

« L’américain s’est en effet rendu compte que la rémunération que touchent les musicien·nes via les plateformes de streaming est insuffisante. Il prend la décision de fonder Bandcamp, un outil qui permet aux artistes musicaux d’offrir la possibilité à leurs fans de streamer leurs morceaux préférés et d’acheter du merch (CD digital/physique, vinyles, T-shirts, cassettes…). »

Cette plateforme très accessible et intuitive donne la possibilité à chaque musicien·ne, ayant une grande audience ou non, de partager sa musique/merch à des prix avantageux et même de proposer du contenu à prix libre.
Contrairement aux plus grosses plateformes de streaming, Bandcamp a payé ses artistes 150 millions de dollars en huit ans, ce qui est énorme pour une plateforme indépendante. Le site clame une totale transparence envers les artistes, expliquant qu’au départ, il ne prenait que 15 % de commission. Par la suite, son chiffre d’affaire annuel atteignant les 5000 dollars, son taux de profit est descendu à 10 %. De plus, les artistes peuvent ajuster eux-mêmes leur prix.



Dans les points positifs du côté des amateurs.trices de musique, on peut citer qu’étant donné que de nombreux artistes ont pris la décision de boycotter les grosses plateformes de streaming, énormément de contenu est exclusif sur Bandcamp. Ce qui en fait finalement, comme vous l’aurez deviné, un temple de trésors. De plus, comme expliqué plus haut, la qualité audio est supérieure aux plateformes de streaming. Il est aussi possible d’effectuer des recherches par hashtag, ce qui permet de faire découvrir aux fans de nouveaux groupes ou encore d’écouter certains morceaux gratuitement de façon illimitée (ou en tout cas un certain nombre de fois selon le choix de l’artiste).

Le revers de la médaille puisqu’il y en a toujours un est que la plupart des amateur·trices de musique hors musicien·nes n’ont jamais entendu parler de cette plateforme. On ne va pas se voiler la face, la plateforme n’étant pas aussi populaire qu’ITunes, Spotify, Apple Music, les artistes présents sur Bandcamp se voient dans l’obligation de passer par d’autres plateformes de streaming sur le côté. De plus, comme nous l’a dit Vincent Zabladowski de chez Cheap Satanism Records : « On est aussi en droit de douter du caractère vraiment équitable du Bandcamp.

« Aucun chiffre n'est communiqué sur le sujet, mais on peut suspecter que de nombreux internautes voient en Bandcamp avant tout une plateforme de streaming gratuite. Combien de personnes n'ont-elles pas écouté des albums entiers sur Bandcamp sans acheter quoi que ce soit en contrepartie. Je plaide volontiers coupable. »

Il faut aussi savoir que si un·e artiste veut pouvoir proposer des codes promo à ses fans, ainsi que pouvoir disposer de ses statistiques d’écoute via la plateforme ou encore des options de streaming privé, il·elle doit souscrire à un compte Bandcamp Pro à 10/mois, soit environ 8,30€/mois. »

En 2015, le groupe Viranesir du label Medümgiriz s’est fait bannir par Bandcamp lui-même à cause de sa musique controversée et offensive. Le chanteur Emir Togrul s’est exprimé à ce sujet : « Tout ce que j’ai fait était d’extraire ces sujets tabous de leurs contextes afin de les remettre en question, parce qu’ils sont vraiment stupides et personnellement je l’ai fait sur le ton de l’humour, c’est mieux d’être ouvert à la discussion d’après moi. » Cet événement représente un frein à la liberté d’expression et pose l’éternelle question de légitimité de la censure dans l’art.

Il est judicieux de noter, comme le fait remarquer Oli Fant de Metal Factory que « Bandcamp est un site qui est créé par des passionnés de musique pour des passionnés de musique. Tant qu'à écouter du dématérialisé, Bandcamp est, pour moi, la plateforme qui rémunère le mieux les artistes. Bien sûr qu'ils ne font pas tout ça uniquement par grandeur d'âme, mais ils ont au moins un business model qui ne pigeonne pas les artistes.

« Et je trouve logique que plus tu achètes, plus tu paies. Bandcamp a des frais, il est normal qu'ils se renflouent. Plus les artistes uploadent de musique, plus il est nécessaire d'avoir un parc informatique important derrière. » »

Il ajoute que Bandcamp propose aussi un système de promotion via ses articles. Bien sûr, si l'album se vend bien, Bandcamp en profite aussi ! Oli s’interroge. Pour un artiste, ne vaut-il pas mieux toucher 90% de 100 copies à 5€ que 100% de 50 copies à 5€ ?



Quant à Albin Wantier de Des Yeux
Des Yeux


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, il pense que Bandcamp est un excellent compromis pour les groupes comme le sien. Lui aussi vend très peu de formats physiques, à part en concert. « Par contre, poursuit-il, depuis la pandémie, les gens se sont mis à nous acheter du digital et on voit clairement un effet Bandcamp Fridays. Sur les douze derniers mois, ça représente une rentrée nette de quelques centaines d’euros, là où Spotify par exemple nous coûte plus qu’il ne rapporte. Pour nous, le calcul fait clairement pencher la balance en faveur de Bandcamp. »

Une régulation européenne ?

Lorenzo Vissol, batteur e.a. de Schizophrenia
Schizophrenia


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, Skelethal
Skelethal


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et Bütcher
Bütcher


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apporte un autre éclairage avec Bigcartel. Cette plateforme américaine offre ses services gratuitement jusqu’à cinq articles mis en vente. Au-delà de cinq articles et jusque cinquante, elle demande seulement 8.47€ par mois.

« Je préfère Bigcartel, poursuit-il, tout d’abord pour la quasi-gratuité du service mais aussi parce que je trouve la commission de Bandcamp sur les ventes physiques totalement injustifiée. »

Il étaye son propos en précisant qu’un groupe professionnel voir semi-professionnel qui déclare ses ventes sur Bandcamp doit payer la TVA, les frais de production, l’agence de management, les frais Paypal, etc. Ainsi au total sur une commande en ligne, 76% du total perçu sert à repayer les coûts engendrés. Cela ne laisse que 24% de profit. Tout ça pour dire que 10% peut paraître peu mais en fonction du fonctionnement du groupe, quand on connait les réels frais engendrés par les ventes en ligne, c’est une somme clairement non négligeable.
Pour Lorenzo, le streaming est un marché complètement dérégulé laissé à la merci des entreprises. Il pense que des mesures de régulations européennes pourraient aider. « Si les plateformes de streaming veulent utiliser le marché européen, dit-il, alors elles devraient se conformer à certaines régulations. Tout comme le fait l’industrie agroalimentaire ou même Facebook. Ici par exemple, payer le prix adéquat aux musiciens. »

Pour conclure, on notera tout de même que tout n’est pas tout sombre dans le big business du streaming. Soundcloud, plateforme collaborative créée en 2007, vient en effet d’annoncer la mise en place d’un nouveau mode de calcul de la rémunération de ses artistes, le « fan-powered royalites (7) » . Les détails pratiques ne sont pas encore tous connus ; cependant, l’objectif global de la démarche est de sortir du schéma basique « 1 stream = x » et, in fine, d’apporter un soutien plus important aux artistes qui bénéficient d’une audience limitée mais fidèle.
En attendant que l’idée de streaming équitable (qui sait ?) fasse son chemin, la résistance s’organise ! Et, comme souvent, c’est par le DIY que ça passe. Un collectif d’une trentaine de musiciens d’avant-garde a ainsi lancé Catalytic Sound Stream en janvier dernier, une plateforme totalement indépendante, organisée en coopérative. Le projet étant toujours en plein lancement, il ne compte qu’une centaine d’abonné·es (141 au 25 mars 2021, très exactement) et, vu la ligne éditoriale hyper-pointue (free-jazz contemporain et musique expérimentale improvisée essentiellement), il n’a de toute façon pas vocation à rassembler des millions d’auditeur·trices. La démarche est en tout cas passionnante (et certainement passionnée) et tend à démontrer que des alternatives aux géants de la musique en ligne existent.
Terminons pour de bon par l’avis clair et tranché de Corvus Von Burtle de Wolvennest
Wolvennest


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. Pour lui, « Le streaming est le fastfood de la musique et une bien triste perspective. Soyons honnêtes, on s'adresse majoritairement à un public qui a encore l'amour du vinyle, et qui comprend qu'on vit très bien sans Spotify. Spotify est le reflet de la société, pas des heures de passion se cachant derrière chaque sortie musicale. »


Reshma, Rosie, Isabelle, Pierre et Olivier.

1. https://siecledigital.fr/2020/04/07/en-2019-les-services-de-streaming-audio-ont-enregistre-une-hausse-de-32-de-leurs-abonnements-payants

2. https://geeko.lesoir.be/2021/02/03/spotify-depasse-les-155-millions-dabonnes-payants

3. https://www.dittomusic.com/blog/how-much-do-music-streaming-services-pay-musicians

4. https://variety.com/2017/biz/news/car-seat-headrests-will-toledo-defends-spotifys-royalty-payments-1202649885

5. https://smartbe.be/wp-content/uploads/2020/06/Musiciens-web-planche-4-moutarde.pdf

6. https://musically.com/2020/07/30/spotify-ceo-talks-covid-19-artist-incomes-and-podcasting-interview

7. https://community.soundcloud.com/fanpoweredroyalties
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AUTEUR : Isabelle
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup...
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière ve...
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière vers un autre secteur et qu’elle est devenue terriblement en manque… d’écriture. A rejoint l’équipe en ju...
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière vers un autre secteur et qu’elle est devenue terriblement en manque… d’écriture. A rejoint l’équipe en juillet 2016....
Ancienne journaliste notamment pour la presse régionale de la province de Luxembourg, elle a couvert, avec son carnet et son appareil photo, beaucoup de concerts et événements culturels et musicaux. Les conditions de travail des journalistes (qui ne sont toujours pas au top, soit dit en passant) ont fait qu’elle a réorienté sa carrière vers un autre secteur et qu’elle est devenue terriblement en manque… d’écriture. A rejoint l’équipe en juillet 2016....

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